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— 75 LA CRISE GRECQUE ET LA POLITIQUE ORIENTALE L'attention de l'opinion publique française a été en ces derniers temps appelée à nouveau et brusquement sur les questions orientales qu'elle considérait, et bien à tort, comme réglées, sinon définitivement, du moins pour un certain temps et d'une manière à peu près acceptable. Il ne faudrait pas s'étonner que l'opinion fût assez mal renseignée sur l'état véritable des choses en Orient. La presse, ni les sphères offi- cielles ne l'étaient beaucoup mieux. Le moindre effort a pour tout le monde des charmes auxquels on ne résiste guère. Des traités avaient été conclus après beaucoup d'hésitations et de remises : quels qu'ils fussent, on ne pouvait pas dire qu'ils eussent été bâclés ; on avait, à défaut d'autre chose, mis du temps à les rédiger. Ils avaient, après de longs délais, été signés avec toute la solennité qui accompagne les cérémonies de cet ordre. D'autres préoccupations plus immédiates et plus pressantes obsédaient et obsèdent encore les esprits. Dès lors on glissait tout natu- rellement et tout doucement, en ce qui concerne l'Orient, vers un optimisme tranquille : on éliminait volontairement des problèmes qu'il eût été gênant, on le sentait obscurément, d'examiner de trop près et on s'en remettait au temps du soin de remettre les choses dans l'ordre, si tant est qu'elles n'y fussent pas complètement. Je sais bien qu'avec un peu de réflexion, on aurait pu voir que la guerre continuait en Anatolie et que les troupes grecques avaient à lutter contre une pression qui n'était peut-être pas très méthodiquement menée, mais qui n'en demeurait pas moins constante : notre situation en Cilicie n'était pas très rassurante; nous étions très souvent accro- chés d'une manière périlleuse et le sang français coulait abondamment sur une terre qui, aux termes des accords, ne devait pas rester dé- finitivement entre nos mains. Il n'eût pas été difficile d'en conclure