Pour une meilleure navigation sur le site, activez javascript.
page suivante »
                                   — 36 —
gneur d'Urfé, cheualier de l'ordre gouuerneur de Monseigneur le Dau-
phin et Baillif de forestz », Granjon déclare qu'il est lui-même l'inventeur
et le tailleur de la nouvelle lettre. Il avait fondu des lettres italiennes, des
lettres grecques, d'autres encore qui étaient toutes hautement appréciées
partout, mais son patriotisme souffrait fort de ce que les Français n'eussent
pas de caractères typographiques à eux, et il résolut d'en faire : «... en me
proposant deuant les yeux, dit-il dans cette dédicace, combien les Hebrieux,
les Grecs, les Latins, voyre plusieurs peuples barbares, ont esté curieux
de leur propre langue, iusques à faire conscience, et tenir à honte de se
s|er]uir des lettres par autres que par eux inuentees, Je ne pouuois non
rougir de la négligence de nos Maieurs en cest endroit, qui ayans de quoy
se passer de leurs voisins, ont mieux aymé estre leurs redeuables, que de
s'ayder du leur propre : chose d'autant plus à deplourer, que si Ion confère
nos caractères francoys (qui ne scay comment nous sont encore demeurez
saufs) à ceux de toutes autres nations, on trouuera qu'ilz ne leur cèdent
en rien ». Il annonce au chevalier d'Urfé que la nouvelle lettre française
est prête et qu'il l'a employée pour l'impression du Dialogue. Il fait entre-
voir en même temps qu'il taillera bientôt une autre lettre du même genre,
mais de plus gros corps : « Je me suis mis à tailler nostre lettre Francoyse,
iustifier les Matrices, en faire la fonte, et finablement la rendre propre
à l'Imprimerie: sy que i'en ay imprimé ce présent Dialogue de la Vie et
de la Mort, espérant s'il plaist à Dieu et au Roy nostre Sire, d'en acheuer
vne autre de plus gros corps, et beaucoup plus belle ».
      Par privilège daté du 26 décembre 1557, figurant dans une autre
édition de Granjon imprimée en caractères de civilité, Philippi Galtheri
poetce Alexandreidos Lïbri decem, nunc primum IN GALLIA GALLICIS CHARAC-
TERIBUS EDITI (1558), Maistre Jehan Nicot accorde à Granjon, au nom
du roi Henri II, le monopole de son invention 'pour dix ans. Voici un
fragment de ce document : « Il ha pieu au Roy, nostre Sire, de donner
privilège et permission à Robert Granjon d'imprimer ce pnt livre de
sa lettre francoise d'art de main : et pour rémunération de son invention,
veult iceluy Seigneur, que nul autre (quel qu'il soit) en ce Royaume :
n'ayt à tailler poinssons, ne contrefaire lad. lettre francoyse d'art de main •
ne d'icelle vendre ne distribuer aucune impression : fors celle qui sera