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                         SIABELEINE                      307

lui, en cas de départ, se résigner à abandonner le soin de
son père et de sa mère h des mains étrangères.
   M. Dupart avait prévu la douleur que causerait à
Madeleine une semblable séparation ; toutefois, confiant
dans la vive affection qu'il lui inspirait, il avait cru que
cet amour dévoué aurait la puissance d'adoucir tout cha-
grin dont il ne serait pas la source.
   Albert, ayant de nouveau et rapidement envisagé leur
position, fit asseoir la jeune fille à sa place accoutumée,
puis lui dit doucement :
   —En effet, chère Madeleine, ce sera un bien long voy-
age, car je suis nommé à Calvi, en Corse. Je reconnais
avec vous que vos parents ne sont pas en état de nous
accompagner: ils ne pourraient supporter un pareil trajet.
C'est là, mon amie, — ajouta-t-il en soulignant chaque
mot, — une des choses de la vie positive qu'on est forcé de
subir.
   Jusqu'à présent, — poursuivit-il, —nous n'avons pensé
qu'à nous aimer ; niais, aujourd'hui, Madeleine, par le
fait même de cette circonstance imprévue, nous devons
nous occuper de certaines dispositions qui intéressent
notre avenir. Je compte sur votre courage, et j'espère que
vous comprendrez que vous seule pouvez me suivre.
   — Quitter mon père et ma mère ! — s'écria Madeleine.
   — Oui, je ne vois pas d'autre moyen... Nous confie-
rons M. et Mme Verneuil à des personnes sûres, largement
rétribuées, et qui, croyez-le bien, les entoureront des soins
et des égards que nécessitent leur santé et leur grand
âge.
   — Quitter mon père et ma mère ! —^répéta-t-elle en-
core.— Y songez-vous? Vous oubliez que ces malheureux
vieillards ne connaissent que moi... Albert, je suis con-
vaincue d'avance qu'ils ne pourraient s'habituer à des
étrangers.