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CHRONIQUE LOCALE On ne s'opposerait point à ce quele diable mariât ses filles, et beaucoup de gens n'iraient pas y voir, si cela n'était pas si préjudiciable à la santé des humains. Mais comment voulez-vous qu'on garde son sang-froid quand on voit nei- ger par un beau soleil, pleuvoir quand le baromètre monte, geler par le vent du midi, avec un mélange de brouillards, de ciel pur, de coups de vents, d'eclaircies, de tempêtes, de bouffées torrides qui fond éclore les fleurs d'amandiers, pousser les groseillers, naître les rhumes, les douleurs, les migraines et s'épanouir une foule de maux dont on se passe- rait ? — Bon temps ! disait hier un médecin. — Mais, sapristi, parlez pour vous, docteur, moi, je n'en raffole pas. Voilà des noces qui durent indéfiniment et je demanderais un peu de renouveau pour sécher la terre, calmer les corizas et rasséréner les esprits, car enfin, il faut que tout le monde vive, si vous le "permettez D'ailleurs, ce qui ce passe au ciel,a bien lieu aussi un peu sur la terre. On tremble et les points noirs surgissent de tous côtés. Où allons nous? qui le sait? qu'allons nous de- venir? mon Dieu ! on l'ignore. On parle d'une conspiration ; dans quel sens ? dans quel but? la Prusse a l'œil sur nous, le commerce est mort, l'industrie languit, on s'amuse, les bals et les dîners vous appellent. On dit que l'Exposition univer- selle serasplendide, les théâtres sont pleins, 700,000 Russes vont passer le Pruth, le Saint Père est malade ; les suicides pullulent, les caissiers fuient, le pétrole augmente, le phyllo- xéra détruit nos vignobles, on ne peut sortir le soir sans