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                           CAILHAVA                          47
effarée qui n'a pourtant pas l'air d'appartenir à un mal-
faiteur .
    A cet aspect, les éclats de rire de M. Valmore recom-
mencent ; Madame sourit ; Boitel s'enfuit, cette fois par la
porte de sortie et l'escalier ; parvenu dans la rue, il ne
sait s'il doit rentrer chez lui ou faire le tour du quai pour
se calmer ; sa catastrophe se représente à son esprit dans
tous ses affreux détails ; il a été ridicule et ne s'en relèvera
jamais. Pâle, troublé, il se dirige enfin vers la pharmacie
 paternelle, mais non sans faire encore un long détour, tant
il redoute, hélas ! l'interrogatoire et la colère de celui à qui
il doit le jour.
    Celle-ci, en effet, ne lui fit pas défaut ; il eut beau ne
confesser que la moitié de sa faute, supprimer le sonnet
 pour ne parler que du looch ; il fut savonné de main de
maître ; un autre looch fut confectionné ; Boitel avoue que
 ce n'est pas lui qui le porta.
    A quelques jours de là, le temps était revenu au beau :
le soleil resplendissait dans l'existence du jeune homme.
 Léon était l'intime ami de M. et de Mme Valmore ; celle-
 ci lui donnait des conseils littéraires et tous deux l'ai-
 maient d'autant plus que sa présentation- avait été plus
 excentrique et plus bizarre.
    Boitel n'hésitait pas, dans son âge mûr, à raconter cette
 aventure de sa jeunesse ; il y mettait une verve, une
 gaîté, un entrain qai amusaient ses auditeurs. Je laisse à
 penser si ce récit dans sa primeur, fait à table , après son
 bain, en costume carnavalesque et au milieu d'amis bien
 disposés, dut faire éclore une désopilante hilarité.
    Il avait à peine achevé le récit de sa fantastique
 odyssée, que les convives entonnèrent les couplets en
 l'honneur de Cailhava. C'était encore Boitel qui en était
 l'auteur, mais, pour cause, il ne les chantait pas :