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MADELEINE 297 Le sourire mélancolique par lequel elle répondit à ce salut, attestait qu'elle avait souffert, mais probablement sans lutte et sans murmure, car il y avait sur sa physio- nomie, silence, résignation et calme. Tout en elle disait cela. Il y a des personnes qui vous parlent ainsi rien qu'en vous regardant. Les jours suivants, M. Dupart n'eut garde de man- quer à sa promenade habituelle, et il revit souvent la jeune fille. Comme il ne l'apercevait jamais ledimanche.il pensa qu'elle s'absentait, "puisque le lundi il y avait un bou- quet de violettes sur la fenêtre. Il pensa aussi qu'elle était pauvre, et qu'elle travaillait par nécessité ; du reste, il ne remarquait que la plus hum- ble simplicité dans sa tenue. Il acquit également la cer- titude qu'elle n'était pas seule dans la maison, ayant un jour entendu une voix impérieuse crier : «Madeleine ! » Elle s'était alors levée vivement. Cette voix ne devait pas être celle d'un maître. Madeleine n'avait pas obéi com- me le fait une servante ; il y avait eu, au contraire, comme une bonne volonté de cœur dans la précipitation avec laquelle elle s'était rendue à cet appel, et pourtant la voix n'avait nulle expression affectueuse. Il crut que Madeleine n'était pas aimée de ceux avec qui elle vivait, que peut-être même elle en était rudoyée. Un jour, pendant une de ses promenades, Albert Dupart se prit à cueillir des fleurs à l'intention de* la jeune fille, et, au retour, timidement, avec un peu d'embarras, il les déposa sur la croisée de Madeleine. Celle-ci rougit, puis lui sourit doucement. A partir de ce jour, elle eut régulièrement son bouquet ; bientôt, aux fleurs des champs, Albert en ajouta quel- ques-unes de son jardin. Madeleine eut des fleurs sur sa fenêtre, des fleurs à sa i