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286 MADAME D'ORGEVAL me M D'Orgeval, née sur les bords du Rhône, à l'entrée des montagnes de la Savoie dont elle voyait, de son berceau, les cimes neigeuses, avait grandi en contem- plant ces fiers châteaux que Biron a détruits et dont les ruines ornent mais ne défendent plus les cols et les pas- sages. Elle avait rêvé, jeune fille, aux histoires chevale- resques dont ils furent témoins. Revenue, dans l'âge mùr, au foyer paternel, dans ce poétique et riant château de Vongnes dont "elle connaissait si bien les archives, privée de son époux, mais entourée d'enfants adorés, elle a consolé son veuvage et charmé sa soli- tude en écrivant pour la jeunesse nombre d'épisodes gracieux, détachés des annales de la Savoie. Le cadre était enchanteur, le tableau varié et charmant; elle a dessiné, peint, jeté quelques paillettes d'or sur sa toile et les éditeurs sont accourus, charmés de pouvoir offrir aux lecteurs honnêtes, aux mères de famille , aux jeunes filles, une représentation émouvante et relativement vraie d'une époque dont la foule aujourd'hui détourne les yeux et qu'une école passionnée ne peint qu'avec les plus noires couleurs. Il n'est que trop vrai que bien des crimes ont eu lieu au moyen-âge. Bien des abus existaient qui révoltaient l'humanité ; mais tout était-il affreux alors ? et aujour- d'hui, l'humanité est-elle si belle et si bonne, la civili- sation dont nous jouissons est-elle si parfaite, qu'il n'y ait plus nulle part des larmes, plus de crimes, plus d'attentats, plus d'abus ? M1™ D'Orgeval a fait comme le peintre qui, dans la nature, prend ce qu'il trouve de plus beau, de plus élé- gant et de meilleur. Elle a choisi, dans les annales de la Savoie, ce qui convenait à sa délicatesse de femme, à sa prudence de mère, à son goût d'artiste et d'écrivain ; et,