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L'ABBÉ PERIUN 15 De la justice a sonné l'heure ; Il voit ses apprêts désolants, On ouvre alors la basse porte, Passage pour l'éternité ; Il monte, et la lugubre escorte L'entraîne à travers la cité ! Pendant un demi-siècle et même au plus grand âge, Perrin sut illustrer cet infime apanage. Sa bonté dominait de féroces instincts, Et fit germer la foi dans des cœurs presque éteints. Seigneur spirituel de ce château sinistre, Il y passe ses jours, s'y complaît, l'administre. Ces hommes dégradés, c'est sa famille, à lui ; Ce devoir, il le fait sans dégoût, sans ennui. Quêteur persuasif, insensible à la peine, Il va dans la boutique et chez la châtelaine. « Pour mes pauvres enfants, dit-il, et par pitié, De votre superflu donnez-moi la moitié. » Jamais un dur accueil ne le démoralise : Il insiste avec tact, et remplit sa valise. Puis rentré dans la cour, l'aumônier diligent Distribue aussitôt les hardes et l'argent. Au long cours de sa vie exemplaire, admirable (1), Il conserva sans cesse une âme inaltérable... Des condamnés à mort pasteur officiel, Il leur parlait de Dieu, souverain juge au ciel ! Assis, dans un cachot, sur de la paille humide ; Respirant avec peine, un air rare et fétide, Le prêtre et le maudit, cet ange et ce démon Faisaient une prière, espérant le pardon. Prélude apostolique, assistance ordonnée Qui précède, en ces lieux, la dernière journée. (1) Perrin exerça son ministère d'aumônier jusqu'à la plus extrême vieillesse.