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h r e , vous passerez auprès de ces êtres qui souffrent, sans
même leur jeter un regard; mais si votre sensibilité ne
s'est pas tôut-à-fait émoussée contre cette société cor-
rompue qui vous entoure, si vous vous êtes conservé
honnête et bon au milieu de ces tourbillons de vices et
de méchanceté, alors vous vous arrêterez devant cette
pauvreté souffrante qui a faim et qui pleure, devant cette
pauvreté qui à tant besoin de consolation et d'amour;
vous fouillerez cette plaie obscure et saignante, vous écar-
terez les lèvres de cette blessure solitaire, et ensuite vous
pourrez comprendre la profondeur des coups que l'ordre
social porte à ses enfants; vous pourrez vous faire, en
vous approchant de lui, une idée de ce marais infect et
putride qui nourrit tant de plantes stériles et immondes,
et si peu de fleurs fraîches et pures. Mais de toutes les
misères qui vous entourent, l'aspect de l'orphelin seul
vous fera surtout sentir l'isolement de l'individu dans ce
cercle qu'on apelle civilisation, où l'action bienfaisante
du principe social, qui devrait s'étendre dans une sphère
croissante à l'infini, tourne sur une étroite circonférence
d'agents, d'employés, qui l'absorbent tout entière au pré-
judice de tous; le reste en est privé; les privilégiés seuls
vivent et jouissent; et quand vous voulez leur faire en-
tendre Cette parole d'en-haut : « Partagez votre manteau
avec celui qui a froid; partagez votre pain avec celui qui
a faim; » ils rient, comprenez-vous? ils rient, pendant
que les autres pleurent.
   Il pleura long-temps aussi, le pauvres Jacques; enfin,
grâce aux soins de son ami, sa douleur s'apaisa. Quand il
fut un peu plus calme, il raconta sa triste histoire à son
bienfaiteur.
   Quelque temps avant les Journées de Novembre, sa