Revue du Lyonnais » série 1 - n°5 ( 1837 ) » pp.033

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la-coupe sublime de son habit et son gentil maintien. La con-
versation languissait. Que dire, en effet, avec uu jeune dandy
qui cherche à lire en tous les yeux l'effet produit par son
passage embaumé? Silencieux et insouciant, je portais donc
au hasard un vague regard sur tout ce qui passait devant
moi, comptant parfois les branches des a r b r e s , et parfois
examinant les tournures des hommes ou les minois fémi-
nins. Mais voilà que par une singulière abstraction les beaux
promeneurs disparurent presque à mes yeux et de toute leur
parure je n'aperçus plus que leurs cannes.
   Il n'y a pas bien longtemps qu'un étranger naïf et fraî-
chement sorti de ses montagnes considérait Lyon du haut
de Fourvières. Il poussa un cri d'élonnemenl admiralif; il
resla ébahi, non pas des sublimes sinuosités du Pihône qui se
déploie au loin comme un ruban d'argent, ou des blanches
Alpes qui couronnent l'horison, au féerique coup d'oeil, non
pas de nos riants coteaux, de notre amphithéâtre de palais...
non! Il fut étonné, ébahi du nombre prodigieux des cheminées,
tout le reste avait disparu pour l u i , il ne voyait que des
tuyaux de cheminées. Il fut ainsi de inoi, le soir que je me
promenais avec mon jeune dandy, je n'aperçus ni les jolies
tailles ni les n o b l e s et belles ou Angéliques figures ni les bril-
lantes toilettes, je ne vis que les cannes. C'étaient des cannes
à droite, des cannes à gauche, et devant m o i , des cannes de
toute forme el de toute couleur, une véritable forêt de
cannes. Cette bizarre hallucination dura quelques minu-
tes. Enfin, fatigué, obsédé par la vue des c a n n e s , je m'é-
criai lout-à-coup :
   « Parbleu, Monsieur, c'est une solle et ridicule manie que la
« manie des cannes. Tout le monde en porte aujourd'hui. Les
« enfants de quatre ans portent c a n n e , et avant peu, sans
« d o u t e , les femmes s'en armeront à leur tour. El pourquoi?
 « pourquoi ? je vous prie ! A quoi sert la canne? elle offre ,
 « j e l'avoue , un utile appui aux vieillards et aux infirmes.
 « Mais lorsque l'on est jeune , ingambe et bien portant, elle
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