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quelqu'une de ces villas blanches ou roses , de toutes formes et de toutes
couleurs, qui s'étagent sur les collines des rives de la Saône ou du Rhône ,
qui se cachent dans les verdoyants replis du Mqnt-d'Or, ou qui émaillent
toute celte campagne ondulée qui s'étend depuis Gorge-de-Loup jusqu'aux
montagnes du Lyonnais? Que sont ces jouissances pour nous tous qui vivons
emprisonnés pendant six jours sur sept dans nos ateliers, dans nos bureaux,
dans les rez-de-chaussées de nos maisons de six étages, où le jour pénètre a
peine, que le soleil ne visite jamais ou ne visite que si rarement? Elles se
bornent,lorsque, au sortir d'un hiver de huit mois, un beau jour nous permet
de hasarder une promenade, à fouler la poussière très-peu poétique de nos
quais, à peine ombragés par de maigres ormeaux ou de maigres platanes
symétriquement alignés, à saisir une échappée de vue sur les coteaux qui
nous dominent ou sur les vertes campagnes des bords du Rhône. El si le
Jardin des Plantes nous présente un coup-d'œil plus gracieux , s'il reproduit
mieux la nature par ses taillis , ses arbres, ses plate-bandes, ses boulingrins,
tout cela est captif, emprisonné derrière des barrières en fer ou en bois,
 comme les animaux d'une ménagerie. Ces jolis arbustes, ces belles fleurs qui
se balancent sur leur tige, qui étalent leurs vives couleurs et exhalent leurs
 parfums, ce sont des étrangères , des indifférentes pour nous : il ne nous est
permis ni de les caresser, ni d'en savourer de près les odeurs. Nous ne pou-
 vons assister à toutes les phases de leur existence, surveiller leur dévelop-
 pement, leur prodiguer ces mille soins qu'une mère prodigue à son enfant,
 et qui sont le charme de l'horticulture comme de la maternité.
   Mais, grâce à elle , cet état de choses change ; l'horticulture détruit les
obstacles , rapproche les distances qui nous séparent des plus jolies produc-
tions de la nature ; elle les introduit dans nos villes, jusque dans nos habita-
lions , et en fait, en quelque sorte, des végétaux domestiques ; grâce à ses
industrieuses inventions, elles gravissent à tous les étages de nos maisons ,
se familiarisent avec nos salons comme avec nos mansardes; elles embellis-
sent les uns et portent aux autres de douces consolations.
   Mais que d'autres vantent les caisses d'orangers, d'arbustes précieux, qui
aux jours des somptueuses fêtes garnissent les escaliers de nos salles de bal !
Sans doute cet étalage de verdure et de fleurs, au milieu de toutes les pompes
de l'art et de toutes les recherches de la coquetlerie féminine ; ces guirlandes
naturelles suspendues au-dessus de ces guirlandes de jolies femmes, enca-
drant le satin , la moire , la blonde et la mousseline transparente ; se
mariant aux bouquets qui ornent les robes des danseuses, aux fleurs qui s'en-
lacent dans leur coiffure; tout cela a bien son charme, tout cela engendre
des contrastes assez piquants, Mais pour moi, je trouve que l'éclat des bou-