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384 section ne tardèrent pas à se présenter à notre domicile pour y mettre le séquestre. « Je dois dire ici que, pendant le siège, mon père avait oc- cupé le grade de sergent dans les grenadiers de la section de Saint-Pierre ; il avait, durant une quinzaine de jours , con- couru à la défense du poste de la maison Combes, à la Croix- Rousse , si connu dans l'histoire du siège de Lyon par le nom de son commandant, le brave Gingenne, qui, vers les der- niers jours de septembre, y eut une jambe fracassée par un boulet. Employé ensuite au service de l'intérieur, mon père n'eut d'autre soin que de veiller, quand il en était commandé, au maintien du bon ordre. « Simple dans ses goûts aussi bien que dans ses mœurs, d'un caractère obligeant,affable, mon père n'avait qu'un ennemi dans sa section, un certain marchand de parapluies, nommé Chabus, officier municipal du temps de la mairie de Bertrand. Que lui reprochait ce brave patriote ? d'être l'ami des riches, d'être ri- che lui-même, et d'être favorable à la cause des rois, comme à celle des nobles et des prêtres. Ces reproches étaient on ne peut plus sots ; mais la sottise alors ne régnait- elle pas en sou- veraine ? D'abord monpère n'était pas ce qu'on pouvait appeler un homme riche ; il était parvenu, en travaillant, à gagner un peu de bien , et plus juste que le citoyen Chabus, il ne por- tait aucune envie aux personnes plus riches que lui. A l'égard des rois, des nobles et des prêtres, la vérité est qu'il les ai- mait, qu'il les respectait, et qu'il avait la plus grande peine à concevoir l'acharnement que certaines gens mettaient con- tre eux. «En 1787, à l'époque de la fameuse assemblée des notables, mon père tenait pour les projels de M. de Calonne, de ce ministre vraiment libéral, espèce de Martignac de ce temps- là , qui ne fut pas compris des hommes du privilège, et qui fut ensuite l'objet de toute la haine des réformateurs radicaux. La résistance des notables, et plus tard celle des parlements, parurent donc à mon père de la plus grande inconvenance.