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248 LA R E V U E LYONNAISE Au-dessus de la tête delà vierge, deux anges soutiennent une couronne d'or- fèvrerie en forme de tiare. A ses pieds, un ange joue de le mandoline. A gauche, en pendant à Maximilien, sainte Catherine d'Alexandrie agenouillée, sur la tête de laquelle l'enfant Jésus place une couronne de roses. Derrière sainte Catherine, divers personnages, parmi lequels la seconde femme de Maxi- milien, Blanche-Marie Sforza, fille de Galéas, duc de Milan, la couronne en tête. Un peu plus loin, un ange montrant le ciel. Au-dessus du groupe qui accom- pagne l'empereur, au pied d'un arbre, Albert Durer s'est représenté lui-même accompagné, comme dans le tableau des Dix mille Martyrs du Musée de Vienne, de son ami Bilibald Pirkheimer. Il porte ce manteau rayé roux et noir, avec lequel il s'est si souvent représenté, et développe dans ses mains un cartouche sur lequel on lit cette inscription des plus explicites : Exigit quinque mestri spatio Alà ertus Durer Gerrnanus M.DVI. Dans le lointain, au bord d'une rivière, une île dominée par des rochers abruptes. Que devint ce tableau une fois terminé? Figura-t-il dans le Fondaco dei Tedeschi? C'est douteux. Au moins tous les guides de Venise, depuis Boscbini jusqu'à celui de 1792, ne signalent-ils dans les édifices publics qu'une seule œuvre 4'Albert Diirer : Le Christ montré au peuple placé au grand tribunal. On ne le retrouve que trois cent cinq ans plus tard, en 1811, où il fut envoyé du Louvre à Lyon. Il venait de Vienne, comment y était-il arrivé? C'est ce qu'il serait intéressant de rechercher. Mais ici la question se complique de l'existence d'un second tableau absolu- ment identique, existant à Prague au fond d'une obscure galerie du couvent des Ursulines (TJrsulinerinen klosler). L'originalité de chacun d'eux a trouvé des champions déterminés dans MM. E. Thausing et Hermann Grimm *. Ces deux opinions nes'excluraient pas,Diirer pouvant avoir répété deux fois le même tableau. Voilà déjà trop longtemps que j'ai vu la réplique des Ursulines de Prague pour oser en parler; mais après avoir étudié celle de Lyon à plusieurs reprises et avec une extrême attention, ma dernière impression a été celle d'un doute très accentué et très persistant. J'ajoute que ce scepticisme est partagé par une autorité en ces matières. La couleur du Rosenkronsfest offre un ton roussâtre et recuit que l'on ne ren- contre jamais chez Albert Diirer. L'on pourrait prétendre que ce ton révèle précisément des restaurations et des vernissages maladroits, qui ont recouvert les parties originales, mais que celles demeurées intactes font preuve d'une fermeté qui n'est pas le fait d'un copiste. La question est là . Il y a des portions intactes dans le Rosenkronsfest de Lyon : cela est indubitable ; mais l'exécution de ces portions rappelle-t-elle celle des tableaux contestés de Diirer? Je ne le pense pas. D'ailleurs la présence au Belvédère de Vienne de l'original des Dix mille 1 M. Miintz, dans sou travail sur la nouvelle biographie de Durer, publié par la Gazette (t. XIV, p. 523), signale des copies à la collection Ambras, à Vienne, et dans une collection de Prague. Je ne les connais pas.