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260 LA. REVUE LYONNAISE tard. On aurait eu ainsi une prononciation an^eis qui, dans les mots wallon, bourguignon et français populaire, aurait laissé choir, selon les règles, la première consonne du groupe gv. De même le celtique gioem a fait notre vieux mot verne pour aulne. Ce n'est pas qu'outre anveie, anwiWe, on ne pût trouver vingt exemples de l'équivalence directe de getv, mais, en général, la transformation est allée de v h g, et non de g à v. Anveau est donc identique au wallon anvèi et au français envoyé, qui est un des noms populaires de l'orvet, et qu'on devrait rationnellement écrire «nvoye. Anvoye est encore assez loin à 'âne-vieux, mais nous trouvons un chaînon intermédiaire dans le forézien, qui appelle un orvet un anivèi. Pour un Forézien anivèi ne signifie pas âne- vieux, parce que âne se dit anou en Forez, et que, si le mot eût été composé, on eût fait anou-vèi et non .anivèi. Mais, dans anivèi, le paysan lyonnais a entendu quelque chose qui sonne à peu près comme âne vieil, et voulant se mettre à parler bon français, parbleu, il a dit âne-vieux ! La corruption de sens est prodigieuse, mais la corruption phonétique patois est très faible. Il est curieux, au reste, de suivre la marche géographique de la corruption. AMornant, à Yzeron, Vanivèi du Forez est devenu oni-vi, qui ne veut pas encore dire âne-vieux [âne se dit oni en patois, mais vieux te dit viù, et non vi), mais qui en est bien près. A Craponne, le saut est fait : on dit oniviù, c'est-à -dire le mot correspondant exactement au français âne-vieux. L'intercalation dei mèdial dans anivèi, quia déterminé la singu- lière confusion faite par le lyonnais, serait tout à fait insolite en français, mais l'introduction d'une voyelle euphonique entre deux consonnes est en harmonie avec les tendances adoucissantes de nos parlers lyonnais et forézien. 11 s'en produit en ce moment même un exemple sous nos yeux. On vient d'établir à Lyon des tramways (inutile de dire que, chez nous, to se prononce»): nos bons canuts en ont tout de suite fait des tramevets par l'interca- lation d'un e euphonique entre les deux consonnes. De même avons-nous, pour plus de douceur, •inséré un i dans remémorier pour remémorer. Une autre, intercalation plus extraordinaire, c'est celle d'une