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m LA. REVUE LYONNAISE a II y a du Zola là -dedans ! » Non que nous pensions méconnaître l'indiscutable talent de l'auteur des Rougon-Macquart : il y a dans la Conquête de Plassans, dans la Curée, surtout dans la Faute de l'abbé Mouret, telles pages qui méritent de demeurer à jamais gravées dans les fastes des lettres françaises. Mais nous croyons que M. Emile Zola est un maître et un guide dangereux. Lui-même n'a pas su ou n'a pas pu éviter les écueils de son sys- tème. Le chantre de Silvère et de Miette, le peintre qui avait broyé sur sa palette les riches couleurs du Paradou, n'a pas craint de signer Pot-Bouille, ce livre que le dégoût fait tomber des mains dès les premières pages. L'abîme attire : si le maître y est tombé, et il est à craindre que chaque jour ne le voie s'y enfoncer plus profondément ; ne sommes-nous pas en droit de dire aux élèves : a Prenez garde ! Méfiez-vous ! » Dans Léonie Chambard, il n'y a pas d'intrigue; le livre n'est que le développement d'une situation, le tableau d'une liaison illé- gitime : enthousiasme du premier moment, refroidissement, dégoût, et séparation finale à la grande satisfaction des deux parties. M. Paul Vignet a su tirer un excellent parti de cette donnée banale et sans grand intérêt : nous reconnaissons les difficultés qu'il a heureusement surmontées, nous le félicitons d'en avoir triomphé. Non seulement il ne les a pas redoutées, mais il semble les avoir multipliées comme à plaisir. En effet, qui l'empêchait de faire de Léonie un personnage intéressant, attrayant, qui eût captivé le lecteur par quelque côté au moins de son caractère ? M. Vignet ne l'a point fait : il a été naturaliste là encore, et cette fois nous lui en faisons compliment. La femme qu'il nous a peinte est réelle, elle existe, peut-être même l'a-t-il Tue et les traits qu'il lui donne ne sont que la reproduction des esquisses ébauchées par un crayon hâtif. Léonie Chambard n'est point une fille : elle n'a eu qu'une aventure, je ne dirai pas une passion. C'était l'enfant d'une famille modeste, mais assez aisée cependant pour lui avoir fait donner une éducation complète : avec le père Chambard qui meurt, la petite fortune s'en va. Léonie, sans ressources, entre dans un grand magasin de parfumerie : là , au milieu des flatteries intéres- sées des clients, elle ne fait point comme avait fait jadis en pareille occurence, cette folle de Jeanne Vaubernier» qui devait être plus