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                LES SUBVENTIONS ARTISTIQUES                          165
    Toutes les industries, suivant Bastiat, sont utiles à la société ; il
 faut les subventionner toutes ou aucune. « Le droit du législateur
 va-t-il jusqu'à ébrécherle salaire de l'artisan pour constituer un
 supplément de profit â l'artiste? » Il nest pas certain que les sub-
ventions favorisent le progrès de l'art : c'est bien souvent une
 diminution proportionnelle dans l'effort des artistes. D'ailleurs
l'Etat est-il capable de discerner ce qui mérite d'être encouragé,
ne peut-il pas aller contre le goût public et contre le bon goût? En
repoussant les subventions, nous ne voulons pas supprimer l'art et
la science. « Nos adversaires croient qu'une activité qui n'est ni
soudojée ni réglementée est une activité anéantie. Nous croyons
le contraire. »
   Quant au motif tiré de ce fait qu'en subventionnant une indus-
trie qui ne peut pas se suffire, on donne du pain à tous ceux qu'elle
occupe, il'ne prouve rien ou il prouve trop. On se ruine à en-
tretenir des industries non viables, à continuer des productions
anti-économiques. Il ne faut d'ailleurs pas oublier que si l'impôt
augmente les dépenses publiques, il diminue les dépenses privées,
presque toujours plus productives. La subvention n'ajoute pas à la
richesse publique : elle déplace seulement les jouissances et les
salaires.
   Le grand inconvénient des subventions, c'est de rompre l'éga-
lité dans la concurrence et de faire contribuer à la dépense des
gens qui n'en retireront nul profit.
   Malgré ces raisons puissantes, les subventions modérées, tem-
poraires, aléatoires, bien distribuées, doivent être maintenues.
S'il s'agissait d'une question purement économique, le raisonne-
ment de Bastiat serait décisif. Au point de vue industriel, le
peintre, le sculpteur, l'écrivain, le savant n'auraient droit, comme
l'agriculteur et le métallurgiste, qu'à la liberté. Les subventions
se justifient par des raisons morales, qui viennent appuyer cer-
taines raisons économiques.
   Un pays a bien certainement besoin qu'une élite intelligente
possède de grandes lumières, ait des préoccupations élevées, fasse
des études désintéressées, ne soit pas absorbée uniquement par le
travail matériel qui conduit à la richesse. Ce travail lui-même
 est fécondé par le savant et l'artiste. C'est l'élite de la société qui