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50 LA REVUE LYONNAISE Ludus pro patriâ ne sera bien jugé que lorqu'il occupera au musée d'Amiens la place qui lui est destinée. Les tons doux et clairs de la fresque dont M. Puvis de Ghavannes abuse un peu, il faut avoir la franchise de l'avouer, gagnent au voisinage de la blancheur de la pierre. J'en dirai autant de son autre ouvrage, Doux pays, panneau décoratif pour l'hôtel de M. Bonnat. C'est bien là ce climat enchanteur, ce ciel radieux de la Grèce que Mo- nime regrette en vers si touchants, mais la simplicité y tombe presque dans l'affectation, et l'on s'étonne d'y rencontrer, de même que dans Ludus pro patriâ, quelques irrégularités de dessin. Quoi qu'il en soit, et c'est en toute sincérité que je parle, nul, cette année, ne pouvait sérieusement disputer la médaille d'honneur à M. Puvis de Ghavannes. M. Hébert est lui aussi un fervent de l'idéal. Sa toile Warum? vous attire et vous retient. On resterait des heures accoudé sur la cimaise, à regarder cette tête douce et mystérieuse, couronnée d'un nimbe de cheveux d'or pâle, à demi perdue dans le clair- obscur du feuillage, et qu'on voit derrière les cordes d'une harpe comme une nonne derrière la grille du cloître. Là encore, il faut s'arrêter longuement et fixer cette énigmatique figure qui vous séduit et vous captive, et dont les doigts diaphanes font résonner l'instrument harmonieux. M. Hébert expose aussi un délicieux portrait de MUe L. T...., fille d'un de nos savants illustres, où l'on retrouve cette grâce et cette distinction qui sont comme le cachet de toutes ses œuvres. M. Hirsch a envoyé deux tableaux. Son portrait de M. D. D... est vraiment remarquable. J'y louerai surtout une qualité que nous ne retrouverons pas toujours chez les autres portraitistes lyon- nais : la tête s'y détache avec un relief, une vigueur extraordi- naire, la physionomie est vivante. Cet ouvrage fait le plus grand honneur à son auteur. Mais la tête de femme intitulée Mauresque me paraît moins bien venue. Malgré la pose qui met incontes- tablement en saillie les muscles du cou, ceux-ci sont trop accentués. M. Jenoudet n'est représenté cette année que par un portrait de M. M..., d'une note un peu éteinte, d'une touche un peu molle, malgré de très réelles qualités.