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NOUVEAUX SOUVENIRS DE PONDICHÈRY 29 tremblement de l'œil droit chez un homme indique un événement heureux, chez une femme un événement fâcheux!; c'est: le con- traire pour le tremblement de l'œil gauche. C'est dans ces préoc- cupations puériles que l'existence des Indiens se passe, et c'est là qu'il faudrait chercher souvent la raison cachée de leurs actes. J'aurai terminé cette esquisse à larges traits de leur caractère, quand j'aurai signalé qu'ils sont joueurs, comme des majors de table d'hôte, et processifs comme des Normands. Le christianisme, on le sait, n'a pas fait fortune dans l'Inde. Il est pratiqué ici par le huitième environ de la population. C'est peu, eu égard au prosélytisme ardent des missionnaires et à l'appui que leur prête l'administration locale. Les bons pères n'ignorent pas qu'il est indispensable de frapper les yeux et les oreilles de l'Indien pour avoir chance d'arriver à son esprit ; aussi prennent-ils à tâche de se montrer en soutanes d'une blancheur éblouissante, coift'és de calottes du plus beau rouge ; aussi se résignent-ils à déployer dans leurs processions une pompe un peu païenne, à promener les statues ' saintes en palanquin, et à faire monter dans une apothéose de mous- queterie des légions d'anges en carton peint, à la voûte dorée des reposoirs; aussi voit-on le vendredi-saint, dans la principale église, une effigie du Christ rouler ses yeux d'émail et pencher sa tète de bois pour simuler une agonie. Fidèles aux anciens missionnaires du Maduré, ils ont soin aussi de ne manger ni bœuf ni cochon, et détenir les parias à l'écart. D'un autre côté, la plupart des emplois à la portée des indigènes sont donnés à des chrétiens. Efforts im- puissants ! Les Indiens tiennent bon, les conversions sont infini- ment rares dans les castes supérieures. Ceux-là seuls viennent à la religion de l'égalité qui sont au dernier degré de l'échelle sociale et sûrs de ne pouvoir pas descendre, quoi qu'ils fassent, dans le mépris public ; je veux parler des parias. Encore n'est-il pas rare de voir les convertis retourner au paganisme après un simulacre d'abjuration. Les chrétiens de caste se distinguent des païens par un surcroît de morgue et par une espèce de toque particulière qui atteint parfois des hauteurs pyramidales. Le ministre du culte remplace pour eux l'officier de l'état civil. On a résolu diversement la question de savoir si un chrétien marié pouvait, en retournant au paganisme,, contracter