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150 SALON DE 1877 bruyante, voilà ce qui charme au premier coup d'œil. On approche : les figures se dessinent, c'est la vieille revendeuse sous son parapluie — car il est aussi là ce meuble épique — c'est la petite dame qui marchande un chou-fleur, dans une attitude ravissante de grâce et de naturel, c'est aussi le petit bourriquet de gauche si réussi avec son pompon rouge. Il est vrai que voilà deux ou trois jeunes femmes dont les poses et la beauté sont p'eut-être un peu trop patriciennes pour la vérité delà scène ; mais ce défaut, si c'en est un, est cent fois préférable à l'excès de réalisme qui menace de nous en- vahir. Il est surtout une petite Arlésienne qui est jolie à croquer, et qui arrête tous les regards. Le public eût désiré que cette belle toile si lyonnaise fût acquise pour nos musées. La ville, en effet, malgré la pénurie de sa caisse, en avait offert, dit-on, une somme assez ronde ; mais un amateur, qui n'avait pas sur les bras toute une po- pulation en détresse, a doublé l'enchère et acquis le tableau envié de tous. M. Compte-Calix est toujours le talent délicat, spirituel, français par excellence. Qu'il nous introduise par les arcades du Palais-Ducal pour nous montrer le jardin des religieuses de Saint-Zaccaria, un vrai jardin de Venise, où de belles Comtesine apprivoisent les plus jolis pigeons du monde ; ou que l'artiste nous entraîne dans l'allée mystérieuse où cheminent deux jeunes filles, pour nous faire deviner leur naïve confidence, — partout il révèle la justesse de ton, le style et l'habileté, qui le préservent de la mièvrerie et qui lui font autant d'amis que de visiteurs. Malgré son excentricité, l'Exécution d'une truie qui a dé- voré un enfant — cela se passe au xv° siècle — est une gau- loiserie qui ne manque pas d'originalité. M. Jules Garnier a tiré toutle parti possible d'un sujet où le costume devait \ tenir une grande place. Le genre éminemment national du tableau militaire est représenté par MM. Protais et Bellangé. VEtape, du pre- mier, longue file sinueuse se perdant au loin, est assez na-