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DU BUGEY. 383 e respectés dans notre province jusqu'au XVI siècle. Ce dou- ble droit fut consacré dans les statuts de Savoie (1). Durant l'anarchie féodale, quelques propriétaires d'aleus, exposés à tous les malheurs de ce régime violent et dépréda- teur, furent contraints de s'inféoder à leurs seigneurs pour avoir droit à une protection spéciale. Leurs terres étant ainsi converties enfiefsou sous-fiefs, ils rendaient foi et hommage et devenaient hommes liges. Les descendants de ces hommes qui, pour acquérir plus de sécurité, avaient ainsi aliéné leurs franchises en se soumettant à un vasselage volontaire, prirent les noms de leurs fiefs et furent réputés nobles par la suite. Ceux, au contraire, qui conservèrent leur indépendance avec leurs aleus francs, restèrent roturiers et formèrent des famil- les bourgeoises. Quelques familles nobles ont cette origine d'inféodation, origine peu glorieuse, mais respectable pour son ancienneté, très respectable comparativement à tous ces titres de noblesse sortis de la corruption des cours ou acquis à prix d'argent. Entre les possesseurs de fiefs et les main-mortables était la classe moyenne et nombreuse des artisans, gens de tous états, hommes libres et simplement justiciables du seigneur. On les appelait bourgeois ou manants. Ce dernier mot était synonyme d'habitants (2). Dans le Bugey, la qualification d'homme lige avait une acception humiliante; elle y équivalait à main-morlable et n'était vulgairement employée que dans ce sens. Un remarqua- ble sentiment de liberté, inné dans notre province, flétris- sait toute qualification qui pouvait indiquer un asservissement. Le bourgeois et le manant n'étaient tenus qu'aux charges (i) Nisi propronentur a possesore, ipsas/res esse libéras. (2) Il vient du verbe latin manerei demeurer, habiter. Le mot maison a la même étymologie.