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140               MADEMOISELLE DE MAGLAND.

admiration aux beautés de la nature ; il y a tant d'harmonies mys-
térieuses entre elles et une ame brisée ! l'esprit se ressent de cette
influence magnétique qui détend les ressorts du cœur et mène à
l'attendrissement par la contemplation. Quelles sont les douleurs que
ue peut endormir le bruit du vent dans les jeunes feuilles des fo-
rêts, que le parfum des prairies ne peut bercer, qui sont sourdes
aux murmures lointains des torrents, indifférentes aux brumes ar-
gentées du matin, aux chaudes vapeurs du soleil couchant ? Ces
accents de la nature trouveront un écho dans votre ame; elle n'est
point de celles pour qui l'hiver n'a point de deuil, le printemps
point de fêtes. Je sais, hélas! que malheureusement ces natures-là
s'attachent bien plus aux misères qu'aux joies de leur existence ;
que la souffrance est répartie ici-bas en raison des facultés que nous
avons reçu du créateur, mais qui sait, après tout, si ceux qui jouis-
sent en oubliant ne sont pas plus malheureux que ceux qui ne croient
plus au bonheur, mais qui se souviennent ?
   Quoique je ne sois plus auprès de vous, ma chère Marie, pour
vous aider à supporter le poids de vos douleurs, promettez-moi que
vous ne vous laisserez plus aller à ces stériles découragements sous
lesquels l'ame reste affaissée et meurtrie ; je redouterais moins pour
vous l'action vivace du désespoir que cet état effrayant de torpeur
où je vous ai vue si souvent. Souvenez-vous que je m'arroge le
droit de vous demander compte de l'état de votre cœur, et que mou
plus vif désir est d'en chasser toute pensée étrangère à la sainte
amitié que je vous ai vouée.
   Adieu, tout le monde ici vous aime et vous regrette.