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                   MADËMOISELLK DK MAULAND.                        23i
épouse, disait-il l'autre jour ; elle le tient en charte privée ; il a
 l'air effaré et tremblant d'un enfant auquel on a ôté ses lisières; on
 en plaisante au cercle ; il se pose en homme grave et religieux ; la
moindre plaisanterie l'effarouche; il hasarde de petites morales, et
ne dépasse pas d'une minute l'heure assignée pour rentrer au logis ;
 il n'est plus élégant, mais il est presque aussi malpropre que ma-
dame son épouse; il est devenu prétentieux, suffisant, puéril, eu
somme, il est d'une vulgarité complète. .— Marie paraît insensible
à tous ces propos, mais il est évident qu'elle en souffre horrible-
ment. Depuis l'arrivée de Raoul, elle n'a rien changé à ses habi-
tudes, mais on voit que ce n'est jamais sans un violent effort de sa
volonté qu'elle se décide à aller dans le monde. Elle préfère à tout
nos causeries du coin du feu, ou nos longues promenades dans ces
merveilleux vallons que nous ne nous lassons pas de parcourir. Oh !
le délicieux pays ! le beau ciel ! En Provence seulement, on com-
prend que le soleil ait été appelé Phœbus !
                                              Tout à toi,
                                        AUGUSTE DE BLOSSAC.




                                 XIX.


                 MADAME O'KENNELY A SON         MARI.




  Hélas! mon ami, c'est vainement que nous avons espéré que le
temps guérirait Marie; changer de ciel n'est pas changer d'ame,
promener son mal n'est pas le guérir. Elle essaye de bonne foi d'é-
chapper à ses souvenirs. Elle a repris ses études, mais les travaux
qu'on s'impose comme remède n'occupent jamais l'esprit ou le cœur
tout entier. Marie est une de ces organisations trop richement douées
qui se flétrissent au milieu de leurs richesses inactives, et chez les-
quelles rien ne remplace ou n'éteint un premier, un unique amour.