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202 1>E LA CHUTE DE l/HOMME joie a fait aimer. Et cette détermination est l'acte propre de la liberté. Suivant le besoin de l'homme, la grâce se répand en lui avec un seul ou avec plusieurs de ces trois éléments, qu'on pourrait appeler les trois formes psychologiques de la grâce. Tel homme voit le bien, mais ne trouvant aucun goût à le faire, s'en abstient. Tel autre voit le bien, aurait du goût à le faire, mais il ne s'en sent pas le courage. Tel autre, enfin, voit le bien, aime à le faire, et prend sur lui de l'accomplir. C'est sur ces trois degrés que se tiennent assis tous les cœurs. Celui qui reconnaît le bien a déjà une grande grâce; si celle vue lui suffît pour l'accomplir, il lui revient beaucoup de mé- rite. Celui qui reconnaît le bien et qui le goûte, a reçu plus de grâce encore ; et s'il a absolument besoin de ce goût pour le faire, il a moins de mérite que le précédent. Enfin, celui qui est obligé de recevoir et la connaissance du bien, et le goût du bien et la force de le faire, ne se réserve que le mérite strict; c'est une liberté dans l'enfance qui demande toutes ses lisières pour faire un pas. Pour celui qui résiste à la grâce comme lumière, comme goût et comme force, il pêche contre le Saint-Esprit, il se met dans la position d'en être un jour tout à fait privé. Dans ces trois opérations de la grâce, la liberté, au lieu de se perdre, s'est au contraire retrouvée. La volonté, éclairée par la lumière ou la vue du vrai bien, sollicitée par la charité ouïe goût de ce bien, redevient libre et droite : libre, puis- qu'elle s'est délivré des suggestions de la matière ; droite, puis- qu'elle se porte du côté du vrai bien. La concupiscence char- nelle, ou le goût des biens passagers, étant balancée par la concupiscence spirituelle, ou le goût des biens immortels, l'équilibre s'établit assez dans l'ame pour que la volonté, quelle que faible qu'elle soit, mais délivrée des mobiles trop forts, devienne une fois capable d'agir d'elle-même, de suivre