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-208              DE LA CHUTE DE L HOMME




                      CHAPITRE XX.


    LA GRACE N'EST-ELLE PAS L'ALIMENT DE LA LIBERTÉ?




   Puisque l'homme tout entier dépend de la liberté, et que la
liberté dépend entièrement de la grâce, sans la grâce que se-
rait l'homme? que serait un corps sans la vie, une intelligence
sans la lumière, un cœur sans l'amour, un être blessé mortel-
lement sans secours? Ce que serait l'homme sans la grâce.
   L'homme n'est lui-môme ni sa vie, ni sa lumière, ni son
bien ; sinon, dans sa soif de bonheur, il se comblerait aussi-
tôt jusqu'à la félicité. Si l'homme était à lui-même sa vie et
son bien, il se reposerait en lui comme l'être infini'; et on
ne le verrait point, dans son esprit et dans son corps, pour-
suivi d'une éternelle souffrance. On ne le verrait point, frap-
pant sans cesse à la porte de la nature et à la porte de l'hu-
manité, demandant à l'une la nourriture, le bien-être et le
repos; implorant de l'autre l'estime, la gloire et l'amour.
Terrible mendiant que l'homme ! comment la nature et l'hu-
manité combleront-elles une faim qui ne demande absolu-
ment que les biens infinis ?
    Si l'homme n'est qu'un cri, si, les deux genoux sur la terre,
il demande la vie, la justice, la paix, s'il implore la vérité,
l'amour, le bonheur, je ne vois que celui qui contient dans
les Cieux la vie, la vérité, l'amour, le bonheur infinis, qui
puisse tendre un secours à cette inénarrable misère !
   Ah ! l'ame ne s'y trompe pas ! elle sait bien, lorsque l'a-
mour est en elle, que ce qu'elle ressent ne saurait être que la