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éprouvait au fond de l'aine un déchirement qui se mani-
festait à l'instant même dans son regard ou sur ses lèvres.
Sa patience et sa résignation dans les souffrances cruelles
qu'il endurait avaient quelque chose de surhumain. Il n'y
a que sa grande foi et sa tendre piété qui peuvent les
expliquer. « Vous souffrez bien, lui disait-on; sans
 « doute, répondait-il, mais Jésus-Christ a bien plus souf-
« fert pour moi ; j'ai confiance en lui ; il est ma force,
« mon courage, mon î-efuge, mon tout, a
    C'est surtout pendant sa dernière maladie que M. de
Servan a manifesté les plus pieux et les plus héroïques
sentiments. Au milieu des souffrances les plus aiguës, il
demeurait calme, résigné, uni à Dieu. Tenant son cru-
cifix à la main, il le baisait tendrement et le couvrait de
ses larmes. « Mon Dieu„ s'écriait-il, souvenez-vous que
« je suis la cause de votre pèlerinage sur cette terre; ne
« m'abandonnez pas dans ces derniers moments. » Si par
hasard la douleur lui arrachait un cri involontaire, il s'en
humiliait comme d'une lâcheté ou d'une faiblesse indigne
d'un soldat de Jésus-Christ. Survivant en quelque sorte
à lui-même dans un corps qui s'affaiblissait tous les jours de
plus en plus, il commençait avant sa dernière heure la vie
d'amour et d'union qu'il est allé continuer dans le ciel.
Comme il se réveillait et s'animait lorsqu'on lui parlait de
Dieu, ou que le ministre de la religion lui apportait les sa-
crements de l'Eglise ! alors toutes ses souffrances semblaient
suspendues, ses organes reprenaient leurs premières fonc-
tions ,, ses facultés , par moment paralysées, revenaient à
leur état normal, son ame retrempée dans le sang de celui
qui renouvelle la jeunesse de l'aigle dominait un corps tout
en ruine, des paroles de feu et d'amour sortaient avec im-
pétuosité de sa poitrine embrasée pour témoigner à Dieu