Revue du Lyonnais » série 1 - n°6 ( 1837 ) » pp.068

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des planches rouges et pourries que l'on devait à l'administra-
tion'des hospices, et c'est là que je fis ma première station.
   Qui peut passer sur un pont suspendu sans songer aux
découvertes inouïes dont les hommes se sont enrichis depuis
dix ans ? Ah ! si Dieu veut nous montrer ainsi un peu de ce
qu'il réserve à nos descendants , nous pouvons être rassurés
sur leur sort, nous pouvons, en songeant combien nos fils se-
ront heureux , nous consoler des maux qu'il nous envoie.
 Et pour me prouver que j'étais injuste de me plaindre de
 nos m a l h e u r s , l'antique prison de Roanne me montra sa
 face hideuse, et reporta mes pensées sur tout ce que devaient
 souffrir les hommes qui élevaient de semblables demeures
 pour leurs réprouvés. Oh! qu'ils étaient malheureux et m é -
 chants ceux qui étaient contraints de torturer leurs sembla-
 bles pour que l'épouvante empêchât les misérables de se ruer
 sur les heureux du jour ! Aussi l'Orient, qui est à peu près
 arrivé à l'époque où Luther sapa les bases de la civilisation
 du moyen-âge, a-t-il encore le p a l , la bastonnade et des
 bagnes infects. C'est qu'en v é r i t é , malgré la tourmente qui
  nous agile , rien chez nous n'est comparable à ce que souf-
 frent les peuples musulmans. Aussi nos prisons seraient
 pour eux des palais enchantés , et tous leurs désirs se bor-
  neraient à y finir leurs j o u r s , tandis que nos prisonniers
 font des vœux ardents pour voir tirer leurs verroux. Pour
 juger notre civilisation, il faut réfléchir à toutes ces choses.
  Voyez , ne sommes-nous pas plus heureux que les sujets de
 saint Louis , qui n'eurent jamais de cloîtres ou de châteaux
 aussi commodes que les maisons d'arrêt de Perrache et de
 la rue Saint-Jean ?
   S'il est consolant de savoir que les détenus sont traités avec
plus de douceur, il estpourtant malheureux de voir détruire un
monument que l'architecte a si bien revêtu d'une enveloppe
lugubre et sévère. Videz cette prison, rien de mieux, mais
respectez un chef-d'Å“uvre ! En voyant ces treillages de fer,
cette masse lourde comme un r e m p a r t , cette porte basse et