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magne et sa barbe mêlée. Mais c'est en vain qu'ils exhor-
tent Oger à prendre la fuite, Oger, immobile et muet,
ne pouvait détourner ses regards avides du spectacle qu'il
avait sous les yeux.
   D'abord il fut tout joyeux. Mais quand il vit Alori le
couard s'enfuir en emportant la vermeille oriflamme,
combien il fut attristé ! non pour ce cruel empereur qui
voulait sa mort, ni pour son baronnage qui la souffrait,
mais pour le saint empire et le peuple chrétien. Oger parla
aux pages : vous allez savoir ce qu'il dira :
   — Vous le voyez, amis, l'armée est en grand péril;
laisserez-vous déshonorer la sainte bannière de France
par ces lâches Lombards? Montrez à tous que vous êtes
vrais fils de princes et de la race des preux. Prenons à
ces fuyards leurs armes et leurs chevaux, et allons de
nouveau porter l'oriflamme aux premiers rangs de l'armée.
   Les nobles enfants lui répondent par d'unanimes accla-
mations. Trois mille ils étaient; encore bien faibles pour
porter la lourde armure, pour manier le frêne épais de la
lance et la large épée à deux mains. Mais sous un tel chef,
chacun se sent les forces d'un géant. Cependant Alori se
précipite le premier dans Rome de toute la vitesse de son
cheval.
    — L'armée est-elle donc défaite? lui dit l'enfant Oger;
 où est le roi ? comment Favez-vous abandonné ?
    — Le roi est pris, répondit Alori, l'armée chrétienne
 n'existe plus. Enfants, songez à vous et à sauver votre
 vie. Jamais jour plus triste ne s'est levé; Rome y sera
 prise et la vraie foi en grand péril.
    A peine a-t-il parlé, qu'Oger lui assène à l'improviste
 un coup de poing qui le renverse à terre tout étoudi; car
 si le bon Danois fut un rude vieillard, il fut enfant plus