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175 l'Europe, auxquellesle tour poétique de son esprit oriental prêtait une originalité piquante , il avait été recherché avec empressement pendant son séjour en Europe, et il en avait conservé le souvenir 5 il s'empressa de se faire notre cicérone à Alger, et ce fut à lui que nous dûmes de connaître quelque chose de la vie intime de ce mys- térieux pays. Mustapha vivait avec ses deux sœurs, q u i , élevées à Livourne, avaient assez perdu des hahitudes du Zénanah (appartement des femmes) pour consentir à nous recevoir. Nous prîmes jour pour notre présentation, à laquelle il fut convenu que se joindraient nos amis , M. Alexis Huder et le jeune Poniatowski. Mustapha occupait l'une des plus belles habitations de la rue des Consuls, celle qui depuis a été convertie en salle de spectacle/ une porte basse, étroite, chargée de serrures et tellement cachée par des pilliers et des bancs de pierre, qu'on eût passé vingt fois devant sans la voir, nous fut ouverte par une vieille esclave voilée. Après avoir traversé un corridor où d'épaisses nattes éteignaient le bruit de nos pas, nous montâmes quelques larges de- grés de marbre, et nous entrâmes dans la vaste cour qui est toujours à Alger le salon de réception. Le bassin du jet d'eau était couvert de plantes aquatiques et entouré de vases remplis de fleurs superbes qui répandaient les plus suaves odeurs. Sur un large divan peu élevé au-dessus du sol, les deux sœurs de Mustapha, couvertes de leurs voi- les, qui ne laissaient voir que de magniiiques yeux noirs, attendaient que leur frère nous conduisît auprèe d'elles. Sans se lever, l'une d'elles dégagea à grand peine une main blanche et grasse de ses larges draperies, et la tendit gracieusement à chacune de nous, avec un mouve- ment des doigts assez semblable au salut amical des Ita-