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174 pourtant quelques-unes des habitudes de nos contrées. Sur un des côtés de la cour que nous avons décrite, un élé- gant portique s'ouvre sur les jardins; là des vigues s'é- lancent à d'énormes piliers formant de fraîches voûtes; les orangers et les citroniers se marient à la plupart des arbres de nos climats ; de clairs ruisseaux roulent leurs eaux dans de petits canaux, ou se réunissent dans de vastes bassins , et entretiennent la fraîcheur et la vie de cette puissante végétation. Dans ces retraites, le parfum d'innombrables touffes de fleurs, le murmure des eaux, le chant des oiseaux, emprisonnés par de légers filets, l'azur constant du ciel, invite à un paresseux recueille- ment d'un charme inconnu à d'autres climats. On se sent entraîné involontairement à cette vie horizontale de cous- sins, de pipes, d'opium, pleine de ces douces rêveries qui mêlent aux plaisirs de l'indolence un sentiment de bien-être qui n'est ni la joie ni le plaisir, mais qui pé- nètre Famé d'une quiétude céleste ; là l'esprit le plus actif, le plus passionné, laisse reposer les questions vi- vantes qui se débattent dans une triste réalité ; là point de ces moments si amers, où de cruels désappointements se réveillent dans de tristes souvenirs ; là les passions s'appaisent, les espérances flétries se relèvent, et ces longues rêveries, sans précipiter le cours de la vie com- templative, produisent sur l'ame l'effet de ces breuvages magiques qui assurent le triomphe du présent par l'oubli du passé. Nous avions connu en Provence, pendant le séjour qu'il y fit avant le blocus, Sidy Mustapha, l'un des Maures les plus distingués de la Régence; de longs voya- ges l'avaient familiarisé avec nos mœurs et nos usages ; plein d'intelligence, parlant la plupart des langues de