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95 lesquels Bayle écrivait, avaient contribué de leur côté à l'ac- créditer. Leurs ouvrages mentionnaient un grand nombre de faits ou de prétendus faits dont ils croyaient pénétrer inti- mement la nature en supposant d'innombrables légions de corpuscules , cavalerie légère à travers l'espace , qui ne pou- vaientêtre saisis par aucun moyen d'investigation. El c'est une remarque à faire en passant que ce dernier état des sciences naturelles. Cette habitude où on était de faire sautiller et vol- tiger des corpuscules pour résoudre ce qui se présentait dans l'ordre physique de problêmes embarassants , n'ont peut-être pas été sans influence sur le matérialisme qni ne tarda pas à se développer au dix-huitième siècle. Ceux qui résistaient à admettre qu'une puissance surnaturelle dirigeât les mouve- ments de la baguette d'Aymar et qui avaient besoin d'une cause physique pour les expliquer, recouraient aux corpuscules. Ils imaginaient que le voleur ou l'assassin, dans l'émotion dont il ne pouvait manquer d'être affecté au moment de son c r i m e , ouvrait ses pores à l'émanation d'une copieuse q u a n - tité de corpuscules qui agissaient ensuite sur la baguette et causaient par une raison secrète ses agitations. C'était tout ce qu'il en fallait qu'une telle hypothèse, ratifiée p a r l e s idées du t e m p s , pour qu'on s'y retranchât avec triomphe. Puis on laissait les simples et les ignorants se repaître de l'illusion qui plaçait la baguette sous le patronage des puissances occul- tes et mettait le diable de la partie. Yoilà comment expédiaient la difficulté ces gens d'esprit qui ne croyaient pas aux esprits. C'est à peine s'il restait encore à leurs yeux dans les divinations d'Aymar quelque chose de surprenant et de miraculeux. Le bel exploit de découvrir un assassin à l'aide de la baguette, quand ce sont les corpuscules perdus en route et traçant derrière le fugitif une traînée accusatrice , qui conduisent di- rectement jusqu'à lui! Cela n'est ni nouveau ni audessus de beaucoup d'antres phénomènes que la physique a constatés. Ne sait-on pas que les atomes qui s'échappent des vignes de Canarie, à l'époque où elles sont en fleur, sont poussés jus-