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— 100 — « Messieurs, nous avons apprins de ceulx qui ont descritz ces endroictz de la terre habitable que les peuples hiperboréens demeurent enveloppez six mois entiers des ténèbres de la nuict et aultres six moys continuellement esclairez du soleil et qui comme ils voient esclaircir, dissipper les ténèbres, ils se remplissent de liesse et saluent par toutes sortes de bienvenues le jour croissant, la lumière naissante et le soleil levant. Ceste trouppe de magis- tratz et officiers qui m'environnent imitant ces peuples incogneus est toute comblée de réjouissance et de contentement de veoir sur la crouppe de ceste montaigne limitrophe du Lyonnois paroistre ceste grande clarté, ceste féconde lumière qui reluist en la face d'une si grande compagnie extraicte de ce grand parlement, de ce grand flambeau qui esclaire toute la France, je voulois dire toute l'Europe, je debvois dire tout le monde. « Nous avons pareille ou plus grande occasion de joye car bien que nous nayons pas esté privés de la clarté du soleil qui darde sur nous à présent ses ardeurs caniculaires nous avons néanmoins senty lesclipse du soleil de ce royaume qui est la justice non pas six mois mais six ans pendant lesquelz nous ne voyons poinct le jour qu'a travers la lueur des armes, l'esclair des mesches et la flamme de division qui devoroit toutes les provinces de ce royaume. La justice ordinaire n'avoit plus de force, la souveraine n'avoit poinct d'auctorité. Nous avions une infinité de phaétons qui s'ingéroit de gouverner ce chariot solaire et en se perdant eux mesmes embrasoient tout le reste, il a semblé raisonnable à nostre bon roy que ceste ville de Lyon qui avoit la première dissippé le ténébreux voile soubz lequel la tirannie se vouloit emparer de la royaulté fust aussi la première illuminée non seule- ment des divins rayons qui procèdent de sa royalle face mais encore de ceste seconde lumière qui représente le grand soleil de tout son royaume, sa Majesté a très bien cogneu que les remèdes les plus propres pour remettre en ordre tout ce que la guerre civile avoit desrangé, c'est l'envoi de ses chambres par son royaume ad faciendam justitiam comme parloyent nos anciens. Il désire nous donner la paix, cella ne se peult obtenir que par la justice. Le Prophète royal disoyt : Justifia etpax osculatœ sunt. « Nous avons tous très grande occasion de croyre que ceste court ne porte point le glaive vengeur dont le Dieu vivant arma son ange extermina- teur pour esteindre les premiers nés d'Egypte mais que d'une main vous