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pent, et c'est alors que s'élèvent sur des rues toujours étroites, ces maisons
à cinq ou six étages qui font de Lyon un objet d'étonnement pour le
visiteur non averti T. Il n'est pas jusqu'aux « mœurs, façons de faire,
manière de vivre » des Lyonnais, en partie inspirés des Italiens, à leur lan-
gage « mêlé de quelques mots provençaux » et à leur « prononciation sem-
blable à celle des Italiens, dont la langue ne leur donne aucune difficulté »3
qui ne contribuent à donner à leur ville l'apparence d'une chose inachevée-
      Telle est l'exacte condition de Lyon au milieu du xvne siècle. Convient-
il de s'en montrer surpris? Faut-il voir dans l'attitude des Lyonnais,
« ramassés » sur eux-mêmes 3, la marque d'esprits timorés ? En vérité, quand
on récapitule tous les malheurs qui ont fondu sur Lyon depuis son origine,
on ne se trouve ni étonné de ces inquiétudes, ni enclin à les blâmer. Un
vieil historien, qui écrivait vers 1666, le P. de Saint-Aubin, après avoir
observé que, pendant les dix-sept siècles qui venaient de s'écouler, il
s'était produit à Lyon « des événements bien différents », déclarait que ce
qu'il y avait « de plus illustre et de plus admirable », c'est que « dans ce flux
et ce reflux des agitations de la fortune », les Lyonnais eussent gardé à leurs
maîtres successifs une fidélité toujours constante 4. Mieux avisé, il eut loué
surtout leur labeur opiniâtre, leur patience dans l'adversité, toutes ces
qualités qui avaient au cours des siècles façonné leur âme d'une manière
définitive, qui leur avaient permis de conquérir pied à pied le sol de leur
ville, malgré des difficultés en apparence insurmontables, et de la conduire,
sans jamais désespérer, au seuil des grandes destinées qui l'attendaient.
                                                                     A. KLEINCLAUSZ.




     1. Dans Lyon dans son lustre (p. 9), donc en 1656, Chappuzeau parle de « la hauteur des bâtiments qui
sont la plupart exaucez jusqu'à six étages ». De son côté, Thomas Coryat écrit en 1608 : « La plupart des
maisons est d'une hauteur excessive, car elles ont six à sept étages au-dessus de celui qui est sur terre, car -
sous presque toutes les maisons il y a des caves voûtées » (Art. cit., p. 330-335).
     3. Cf. Propos d'un Dauphinois en 1571, cité par Bonzon, la Banque à Lyon, p. 54, et Journal d'un vo-
yage de France et d'Italie..., p. 346. A un siècle d'intervalle, les choses n'ont pas changé.
     3. Ville belle, grande et ramassée. Journal d'un voyage de France et d'Italie, p. 347.
     4. Histoire de la ville de Lyon. Epistre.
     Rev. Lyon.                                                                                        3