Pour une meilleure navigation sur le site, activez javascript.
page suivante »
                                                — 54 —
voit le dieu Pan capripède qui combat avec Cupidon » T ; et il cite un autre
exemple de « ce sujet allégorique et gymnique tout à la fois », une fresque
d'Herculanum, dont nous aurons à reparler, tableau qui appelle en effet
une comparaison avec le nôtre. « Excepté l'Hermès, la composition est la
même » ; affirmation inexacte ; non seulement l'Hermès est absent, mais
deux autres personnages sont présents, Bacchus et Ariane. Pour le surplus,
le rapprochement est juste : « Le vieux Silène est drapé de la même maniè-
re ; c'est un combat entre Pan et l'Amour, dont Silène paraît être le juge ».
Comment, après avoir vu la vérité, après l'avoir affirmée de façon si nette,
Artaud en vient-il, dans la suite de sa notice2, à connaître la perplexité et à
se décider pour une interprétation fausse? Ayant fait une enquête, très
superficielle d'ailleurs, sur les opinions de ses devanciers, il n'a pas su main-
tenir la sienne contre leur autorité. L'erreur qui l'a séduit et qu'il attribue à
Spon est celle de Menestrier 3 : « Spon est le premier qui a expliqué la
peinture de cette mosaïque... Il a cru voir dans le sujet le combat de l'amour
divin et de l'amour profane... Revenant donc à la première idée de Spon,
nous aimerions bien voir dans le sujet de notre peinture le combat de
l'amour divin et de l'amour profane, c'est-à-dire le génie du bien et le gé-
nie du mal sous les traits d'Ëros et d'Antéros ». Lorsqu'il s'exprimait ainsi,
Artaud avait oublié le nom de son auteur et le texte exact de Menestrier
que sa glose défigure ; on se demande même s'il n'avait pas oublié qu'il
parlait de la mosaïque Cassaire, non de la mosaïque Seguin, celle des Jeux
de la palestre, où nous verrons en effet la lutte d'Ëros avec un autre génie
auquel le nom d'Antéros convient certainement mieux qu'au monstre
capricorne et capripède du tableau maintenant en question. Avant d'adop-
ter, non sans l'avoir altérée, cette prétendue première idée de Spon, Artaud
lui en prête une autre qui rappelle vaguement sa véritable première idée

     i. Comp. Cochard, Description historique de Lyon, p. 298 : «... tableau sur lequel on a représenté la lutte
de l'Amour avec Pan ; une divinité faisant les fonctions dé gymnasiarque tient d'une main la palme destinée
au vainqueur, tandis qu'elle montre de l'autre l'Hermathène en face ». De même, à peu près textuellement,
Guide du voyageur et de l'amateur à Lyon, p. 119. Comp. aussi Indicateur de 1810, Curiosités.,., p. 13.
     2. P. 57 et suiv.
     3. Avec cette différence, pourtant,que Menestrier avait dit: «Combat de l'amour lascif et de l'amour
honnête ». Delandine, qui adoptait la même opinion, la traduisait plus fidèlement (Bulletin de Lyon, 1806,
p. 74) : Le tableau « offre l'emblème de l'amour déréglé et de l'amour pudique ». La définition de Bazin en
est une variante assez libre (Vienne et Lyon..., pass. cité) : « On a cru reconnaître dans cette représentation,
qui d'ailleurs n'est pas rare, la lutte des penchants bons et mauvais ».