page suivante »
M. MARCO MINGHETTI 483 de quelques individus ; ils ne sont plus les représentants de la nation, mais les agents d'affaires de leurs électeurs, et se trouvent ainsi obligés de fréquenter plus que la Chambre l'antichambre des ministres. De pareilles exigences troublent et corrompent à la fois l'atmosphère parlementaire et l'atmosphère administrative. » Ces deux citations, empruntées à l'ouvrage de M. Mittghetti, prouvent que tous les partis reconnaissent la gravité du mal. Avec la réserve d'un patriote, l'ironie d'un lettré, mais aussi avec la vigueur d'un homme politique, l'auteur en a tracé en quelques pages le plus saisissant tableau. Après avoir établi que l'Etat moderne doit surtout rendre la justice et bien administrer, il étudie tour à tour comment il s'acquitte en Italie de ces deux importantes fonctions. « La civilisation d'un peuple se mesure, dit-il, à l'impartialité de sa magistrature, et un des grands progrès de la civilisation moderne consiste dans l'inamovibilité des juges, car il n'y a pas de chose plus contraire à l'impartialité et plus corruptrice que la crainte de perdre sa place par des raisons politiques ; plus corruptrice même, selon Benjamin Constant, que l'ancienne vénalité des charges. Or, la révolution italienne qui, dans beaucoup de provinces a respecté la composition existante des tribunaux, a été entraînée dans le midi par la manie de l'épuration, si funeste aux services judi- ciaires et administratifs. De là , des révolutions nombreuses, des déplacements plus nombreux encore, sur lesquels on peut consulter avec fruit un livre de M. Mirabelli1. Chez les magistrats italiens. l'affaiblissement de l'indépendance a une autre cause assez curieuse. 11 paraît que le Ministère public se mêle trop de la distribution de la justice. Sans doute, on doit regarder comme indispensable un magistrat qui veille à l'exécution de la loi, qui représente l'intérêt de la société, et exerce contre les coupables l'action publique Mais il ne faut pas qu'il représente une surveillance soupçonneuse ni une pression continue et souvent fatigante du gouvernement sur les tribunaux. L'action publique elle-même n'est pas toujours exercée suivant < L'inamovibilità délia mar/istratura nel regno d'Italia, considéra;ioni.— Napoli, 1880.