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 nous dévoile cette Italie telle que l'ont faite l'invasion des Barbares, la retraite
 des empereurs et surtout l'extinction du caractère national. Nous y voyons les
 champs déjà incultes, les routes impraticables, les marais infects usurpant le
 domaine de l'homme; l'antique religion ébranlée dans ses fondements, et les
 nouvelles croyances éprouvant, sur cette terre classique du paganisme, la
 double opposition de la routine et du mépris.
     Rulilius n'est point un auteur difficile. Toutefois il est agréable d'avoir
  sous la main, pendant cette lecture, un guide concis comme le texte, cons-
  ciencieux plus qu'un commentaire, abordant franchement les difficultés et
  les résolvant sans verbiage. Telle est la version de M. Collombet, point de
  périphrases suspectes, point de prétentions poétiques; elle met le mot sur
  le mot, reproduit le texte latin et pourtant reste française. M. Collombet
  a raison : le temps des belles infidèles est passé. Quiconque ouvre une tra-
  duction de Rutilius, cherche le secours d'un érudit et non l'œuvre d'un
  artiste. Cependant le traducteur n'aurait-il pas pu quelquefois concilier plus
  heureusement la fidélité avec l'élégance? Et même, quand on traduit un
  poète, l'élégance ne fait-eïle pas un peu partie de l'exactitude. Par exemple
  ces deux vers du débat, où le poète, après avoir envié le bonheur de ceux
  qui sont nés à Home, place au second rang l'avantage d'y fixer son séjour,

                  « Felices eliam qui proxima mimera primis
                    « Sorliii, latîas obtinuere dénies ! »

  Sont-ils traduits d'une manière satisfaisante par:
    « Heureux encore, ceux qui, ayant obtenu des faveurs voisines des pre-
  « mières, ont acquis des maisons dans le Latiuia ! «
  Ne vaudrait-il pas mieux dire :
    « Heureux encore qui, moins favorisé des dieux, put au moins y fixer sa
  « demeure ! v
    Ce beau vers où sa patrie lui apparaît plus touchante dans ses malheurs,

               « Sed quam grala minus, tara miseranda magis »
  n'est-il pas un peu défiguré par cette version :
     « Qui sont d'autant plus dignes de pitié qu'ils sont moins beaux ? »
  Nous aurions mieux aimé dire :
     « Moins ils plaisent aux yeux plus ils touchent le cœur. »
     A part quelques observations de ce genre que nous pourrions encore
  soumettre à M. Collombet, nous n'avons qu'à le féliciter de son travail.
  Préfaces instructives, notes substantielles et intéressantes, texte pur, publié
, d'après la récente édition de M. Zumpt, tout contribue à faire de ce volume
                                                                     33