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473 Shakspeare et Milton ont deviné l'image, et qu'ils ont comme initié d'avance à leur glorieux triumvirat ! À sa suite marchent Crabbe, peintre trop fidèle et souvent trop cynique des fautes et des misères humaines, Coleridge, Shclleij, dont l'énergie native dégénère quelquefois en enflure, et Thomas Moore, le barde irlandais, chantre inspiré des maux de sa patrie, interprète mélodieux et brillant des séduisantes fictions de l'Orient. En suivant cette série imposante d'écrivains de tous rangs et de tous genres, dont je n'ai pu, dans cette rapide esquisse, effleurer que les sommités ; en descendant le courant des âges depuis les temps barbares jusqu'au siècle présent, on remarque, dans la langue et la littérature des peuples de la Grande- Bretagne, six grandes phases ou époques dominantes, distin- guées entre elles par des contrastes frappants. Période celtique, période anglo-saxonne, période franco-normande, avant la fixation de la langue, et la naissance du goût littéraire ; période ascendante de force et de génie, depuis Elisabeth jusqu'à Crormvel; période stationnairc de pureté et d'élégance, depuis Guillaume III jusqu'à George I I ; période, dirai-je de décadence ou de renaissance vigoureuse, depuis Geor- ges III jusqu'au moment actuel, où l'Angleterre compte tant d'hommes remarquables? Pour bien apprécier chacune de ces périodes, il faudrait pouvoir les approfondir en elles- mêmes, considérer quels sont les éléments qui entrent dans la composition de chacune d'elles, quels mouvements et quelles vicissitudes en ont constitué le principe, quelle fusion de peuples et d'habitudes en a déterminé la base et modelé le caractère : étude immense et trop abstraite peut-être pour la suivre dans tous ses détails, mais que je présenterai d'une manière générale en ne touchant qu'aux points principaux, de même que, dans la poésie anglaise, je ne m'arrêterai que devant les grands génies. Shakspeare, Milton, Pope, Scott et Su*