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462 religion sainte qu'ils ont persécutée, puis admise, puis désho- norée, tend à s'affranchir de ses entraves et à étendre le cer- cle de ses conquêtes, conquêtes salutaires des âmes qui assu- rent la vie au sein même de la mort ! Aussi, dans le fracas des armes, au milieu du sang et du carnage, au bruit de l'empire qui s'écroule et des états rivaux qui surgissent, dans cette longue agonie de l'Europe qui semble toucher à sa fin et devoir s'abîmer sans retour dans la désolation du chaos, une pensée auguste, impénétrable, puisque elle est la pensée de Dieu même, domine le bouleversement des trônes et l'hor- rible écroulement des cités. Cette pensée que nul esprit ne peut saisir dans son actua- lité dévorante, mais dont les bienfaits infinis se feront sentir à tous les siècles, cette pensée c'est la fusion des peuples, gage certain d'un glorieux avenir. Tous ces barbares, sortis de leurs forêts et entraînés par l'amour du pillage, tous ces visages menaçants et féroces, aux yeux ardents, aux cheveux hérissés, portent cependant dans leur mâle poitrine les étin- celles d'une flamme sacrée. L'humanité germera dans ces cœurs animés d'une juste vengeance. Rome, leur ennemie, tombera sous leurs coups ; mais la lumière du monde ne sera pas éteinte. Elle renaîtra plus vive et plus brillante du sein de tant de luttes acharnées; elle éclairera la croix du salut plantée au faîte du Gapitole. Attila tremblera devant elle et arrêtera ses courses dévastatrices, Alaric fuira plein d'épouvante avec son armée devenue chrétienne, Théodoric, Clovis, vien- dront lui rendre hommage à la tête de leurs troupes victo- rieuses ! Quelle mejveilleuse fusion de peuples et d'idées ne marque pas cette époque décisive, cette seconde naissance de l'Europe, si féconde en grandes destinées! Les barbares agis- sant sur Rome par leurs armes, leurs mœurs, leurs idiomes, reçoivent d'elle, dans une plus grande mesure et par une empreinte ineffaçable, sa religion, sa langue et sa littérature