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484 de l'idéalisme transcendental de Kant. Malgré cette erreur fondamentale, la critique de la raison pure contient des vérités fécondes qu'a recueillies et fortifiées encore la philosophie française du XIXe siècle. Mieux que Descartes, et avec plus de rigueur, Kant a établi que l'étude de l'esprit humain était le point de départ, nécessaire de toute saine métaphysique, et M. Cousin n'a que des éloges à donner à son point de départ et à sa méthode. Il est encore une autre grande vérité dont la critique de la raison toute pure contient l'irrésistible dé- monstration. D'autres philosophes, avant Kant, avaient re- connu l'existence d'éléments a priori au sein de l'intelligence humaine, mais Kant, le premier, a démontré que toute pen- sée, sans exception, la plus élevée comme la plus humble, renferme nécessairement , comme partie intégrante, un élément qui ne vient pas de l'expérience, un élément a priori. Par la démonstration de cette grande vérité, Kant a pour jamais ruiné les fondements du sensualisme. Enfin, quoique le système de Kant conduise au scepticisme, il serait injuste de mettre Kant au nombre des philosophes scep- tiques. En effet, si Kant est sceptique dans la critique de la raison pure, s'il ne craint pas de nier ou de mettre en doute l'existence de Dieu, de l'ame, de la liberté, de l'immortalité, dans la critique de la raison pratique, dans la morale, il ré- tablit d'une main ferme toutes ces vérités ébranlées sur le fondement de l'idée du devoir. Il fait rentrer par la morale dans la science l'être qu'il en avait banni par la métaphysi- que. Il est vrai qu'il ne sauve et ne rétablit en morale les vé- rités qu'il a niées en métaphysique, qu'au prix d'une incon- séquence. Mais cette inconséquence honore le caractère du philosophe, et c'est à elle que nous sommes redevables du système de morale le plus vrai, le plus beau et le plus pur qu'ait produit la philosophie moderne. Nul philosophe n'a élevé plus haut l'idée du devoir, nul ne