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mer des complots, des assassinats, des trahisons, puis à dénon-
cer ceux qu'il avait entraînés dans ses crimes; prince incapa-
ble d'attachement et d'affection, léger et insouciant, aussi gai
après ces fréquentes dénonciations et le supplice de ses compli-
ces que s'il n'avait pas laissé ses amis en route, suivant les
propres expressions de sa fille?
   Nous devons avouer, néanmoins, que ces victimes illustres ne
sont pas les seules, et que beaucoup d'autres furent jugées
par les tribunaux de Richelieu et exécutées. Mais il faut
prendre garde d'exagérer dans ce cas et s'imaginer, comme
certains pamphlets le feraient croire, que la maison de Riche-
lieu, à Ruel, fut un lieu de terreur et de supplices. Le nom de
ceux que le cardinal y fit condamner est connu ; les pièces de
leurs procès existent, et de leur examen résulte encore la
preuve évidente qu'ils furent coupables de crimes, sinon aussi
éclatants que les grands personnages dont nous venons de
parler, du moins de crimes aussi certains. Une autre objection
contre Richelieu, c'est que, dit-on, il enleva presque toujours
les accusés à leurs juges naturels et les traduisit devant des
commissions spéciales nommées par lui. A cette accusation
nous avons répondu déjà que tels étaient les usages du temps ;
que Richelieu se conforma à ce qui s'était fait avant lui, à ce
qui se fit après. Si cette réponse était jugée insuffisante, nous
 ajouterions une considération d'un ordre plus élevé. Les
hommes qui marchent en avant de leur siècle et lui ouvrent la
voie vers un avenir encore inconnu, ne sont que rarement
 compris par leurs contemporains; souvent ils ont contre eux
l'opinion publique et les préjugés. Dans un semblable état de
choses, il est bon que la constitution offre des voies extraordi-
 naires pour des cas extraordinaires, et que la loi fournisse les
 moyens de se mettre, dans certains cas donnés, au-dessus des
 lois. C'est ainsi que les Romains avaient établi la dictature sans
 laquelle, dit Machiavel, ils n'auraient pu résister à des secousses