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  mes rudes de l'antiquité ; l'allégorie habite pêle-mêle avec les
  traditions mythologiques qui, alors déjà, n'étaient plus des
  nouveautés.
     C'était donc en réalité une décadence de la poésie lyrique,
  décadence qui demandait une nouvelle réforme. Elle ne lui
 manqua pas, et ce fut Malherbe à qui il fut donné de l'accom-
 plir : mais ne nous trompons pas sur le véritable caractère de
 Malherbe en tant que réformateur, et n'allons pas lui attribuer
 un génie et une importance qu'il n'eut jamais. Malherbe n'é-
 tait certainement pas un poète dans la plus belle acception de
 ce mot ; et c'est pour cela qu'il ne faut pas trop ennoblir pour
 lui ce tiîre de réformateur. Il n'a rien réformé, rien innové de
 fondamental dans la pensée et dans l'inspiration lyrique; seu-
 lement, doué de beaucoup de bon sens et de goût naturel, il
 sentait à merveille qu'il fallait une langue nationale à la
 France, et que cette langue, à peine formée, commençait déjà à
 se corrompre et à tomber dans le mauvais goût ; il en appela
 au sens commun pour donner de la pureté à l'expression et de
l'harmonie à la phrase. Il ne fut donc pas, comme le dit bien
à tort La Harpe, le créateur de la poésie lyrique, mais plutôt
le créateur du style lyrique. Il ne fil que remettre sur la bonne
voie des écrivains qui s'égaraient aveuglément ; il reconstruisit
la forme de la strophe lyrique, il rendit au style de l'ode et de
l'hymne d'abord la clarté, la dignité, la correction qui lui
manquaient, puis le rhythme et la cadence. En détruisant tout
ce qu'avait de pédantesque et de barbare l'ode empruntée aux
Grecs et aux Latins, tout ce qu'il y avait de peu français dans
la langue, moitié italienne, moitié gasconne, qu'on parlait
alors, Malherbe a fait une Å“uvre vraiment nationale, et cette
gloire est bien assez belle, sans qu'il faille faire de lui un poète
de génie. D'ailleurs il ne s'est point borné à prêcher cet ap-
pel au bon goût et au sentiment de l'harmonie, il en a donné
lui-même de nombreux modèles qui, aujourd'hui encore, ne