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497 dernier mot dans leur morale. S'il est juste d'ajouter pour la gloire du fondateur de la méthode d'induction que sa pensée a été mal comprise et fortement exagérée après lui, il n'est pas moins vrai que sa méthode, en tant qu'on la considérait comme la méthode légitime des éludes noologiques, est main- tenant détrônée dans la philosophie. Dans la physique et dans les sciences d'application aux- quelles personne ne conteste encore l'unique emploi de l'ob- servation et de l'induction comme procédés nécessaires, on arrive à peu près aux dernières limites du domaine des grandes lois découvertes par les siècles précédents; on n'invente plus, on perfectionne, on pratique. Par l'observation et par l'expé- rience, on obtient ces applications ingénieuses qui surpren- nent le vulgaire autant que les inventions elles-mêmes. Mais pour ceux qui ne pensent pas que la nature nous ait livré tous ses secrets, et que la physique soit achevée, ils osent croire qu'un jour approche où l'empirisme, qui ne fut jamais le pro- cédé des génies créateurs, sera regardé comme insuffisants même dans les sciences naturelles, et où les philosophes res- titueront le rang qu'il a usurpé à la méthode génératrice par excellence, à celle qui a son fondement dans les notions absolues de la raison, en un mot, à la méthode rationnelle. Pour donner à nos deux assertions une formule plus g é - nérale, nous dirons que l'ère philosophique que l'on fait dater de Bacon est sur le point de finir et qu'une ère nouvelle a déjà commencé. Les savants, les hommes pratiques, les philoso- phes qui appartiennent encore à l'esprit du dix-huitième siècle, vont se récrier, et quoique le nom d'époque de transition a p - pliqué à la nôtre soit dans toutes les bouches, peu de gens nous accorderont que les transformations imminentes s'éten- dent jusqu'à un changement de méthode; on réclamera l'é- ternité pour celle à laquelle on attribue toutes les grandes conquêtes des trois siècles qui nous précèdent.