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880 Je répondis que par fortune étoye Mis en exil en ce bois, longtemps a, Et qu'à bon droit appeler me pouvoye L'homme esgaré qui ne sçait où il va. H y a quelque chose de plus sérieux et de plus triste dans la mélancolie de l'évêque Octavien de Saint-Gelais. Le souve- nir du temps passé, et de sa belle jeunesse à jamais perdue, lui suscite les regrets suivants, où nous ne serions pas éloignés de trouver quelqu'apparence de pathétique : Ores connois mon temps premier perdu ; De retourner jamais ne m'est possible. Déjeune, vieux, de beau, laid suis venu. En jeunes ans, rien n'était impossible A moi, jadis, hélas ! ce me sembloit. Adieu, vous dis, nobles et plaisants lieux Où j'ai passé ma jeunesse première : Ores vous perds, car je suis venu vieux : Age a reçu de moi rente plénière. Quand à part moi me souviens et remente Biens et soûlas que j'avois à loisir ; J'en ai un deuil qui passe tout plaisir. Enfin, qui le croirait? Villon lui-même, ce franc escolier du XVe siècle, libertin et voleur, auteur des Repues franches, se prend aussi d'un beau regret en songeant au temps jadis. Et certes ses rêveries mélancoliques ne lui inspirent pas des accents moins doux ni moins touchants, moins poétiques sur- tout, que le dévergondage peu honnête de son imagination. Qui ne se rappelle ces jolies strophes d'une de ses plus jolies ballades ? Dictes moy où, ne en quel pays, Est Flora la belle Romaine,