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27 début de son duel avec le représentant de l'autorité, il l'employa pour tuer son adversaire. A ses yeux, « lesillogisme aristotéli- cien n'est qu'un âne qu'il faut avoir soin d'attacher au bas de la montagne, quand on veut, comme Abraham, sacrifier sur les hauts lieux. (1). » Cet adversaire, ce fut d'abord Tézel, dominicain fort peu rieur de sa nature, versé, quoiqu'on en ait dit, dans la science des divines écritures, mais qui ne marchant jamais sans un atti- rail d'arguments dérobés aux maîtres de l'école, ne pouvait at- teindre cefilsdu mineur Mohra, qui, selon un écrivain protes- tant, « va, vient, brise la haie qu'il ne peut franchir et escalade monts et vaux à la façon du diable (2). » Vousfigurez-vousl'ébahissement de Tézel à la réception de ce singulier défi ? « De tes cris, vois-tu, je me moque comme des braiements d'un âne : tu me parles d'eau et de feu. De l'eau! voilà le jus de la treille ; du feu ! vive l'odeur de la marmite. Donc, viens à Wittemberg: moi docteur Martin, atout inquisiteur de la foi, mangeur de fer rouge, pourfendeur de rochers, salut : faisons savoir qu'on trouvera ici porte ouverte, table bien servie, soins empressés, grâce à la bienveillance de notre duc et prince, l'é- lecteur de Saxe (3). Refuserez-vous un peu de pitié à ce pauvre moine qui vient d'entrer à Juterboch aux sons des cloches, portant sur un cous- sin de velours la bulle de pardons de Léon X, et qui se voit arrêté dans son chemin, non comme Héliodore par quelque resplendissante épée : à tout prendre il n'y a pas de honte à fuir devant un ange ; mais arrêté par un moine qui va chercher (i) Mathesius, vita Lulheri, Tisch-Reden. (2) Almanach fur Luthers Vereher, Erfurt, 1817. (3) Ut pro aqua liquorera vitis et pro igné fumum culinœ ex ansevibus appe- lât.