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1G de génie, elles ne sauraient être ridicules. Non seulement elles ne sont pas ridicules, mais elles sont nécessaires, car c'est avec les grandes prétentions qu'on fait les grandes choses. Cependant cette excessive confiance de Descartes en son génie a été pour lui, il faut le dire, la cause de plus d'une erreur et de plus d'une injustice. Il a une foi inébranlable en ses principes, en ses plus hardies hypothèses, et il s'efforce d'y tout ramener ; il ne saurait rien souffrir qui les contre- dise ou qui s'en écarte. De là , ses jugements passionnés con- tre ses contemporains ; de là cette mauvaise humeur contre des objections trop pressantes ; de là encore cette répugnance à accorder l'éloge, et cette répugnance marquée à avouer ce qu'il avait emprunté, soit à ses prédécesseurs, soit à ses contemporains. De toutes les grandes découvertes scientifi- ques qui marquèrent la fin du XVe siècle et le XVI0 tout en- tier, il n'en est pas une seule, à l'exception, peut-être, de la circulation du sang, — encore prétend-il avoir corrigé Har- vey, — dont il ait reconnu dans ses ouvrages l'importance et la grandeur, et dont il ait loué convenablement les auteurs immortels. Il n'a pas rendu justice au génie du plus illustre de ses contemporains, Galilée ; il en parle dans quelques-unes de ses lettres, et tout ce qu'il lui accorde, c'est de philoso- pher un peu mieux que le vulgaire, mais il méconnaît l'im- portance et la valeur de ses découvertes ; il les repousse, ou du moins ne leur concède qu'un médiocre mérite. Cependant Galilée était incontestablement le premier physicien du siècle, comme Descartes en était le premier mathématicien. Mais la mission de Descaries n'était pas seulement de dé- truire, elle était surtout de fonder. Il n'est pas seulement un révolutionnaire, il est un chef d'école. Appelé à faire triom- pher l'œuvre qu'avaient préparée et commencée tous ces mar- tyrs héroïques de l'indépendance de l'esprit humain, dont l'histoire du moyen-âge, à partir de David de Dinan jusqu'au