page suivante »
15 on ne trouve dans les ouvrages de Descartes que les noms de Campanella et de Bacon. 11 porte un jugement très sévère sur Campanella, dont la conclusion est que ceux qui s'éga- rent en affectant de suivre des chemins extraordinaires, lui paraissent beaucoup moins excusables que ceux qui ne s'éga- rent qu'en compagnie et en suivant les traces de beaucoup d'autres. Enfin, il cite deux ou trois fois Bacon dans ses let- tres, sous le nom de Vérulamius, et se borne à en dire qu'il juge sa méthode utile pour diriger et régler les expériences. Descartes ne possède pas à un moindre degré cette con- fiance en lui-même, je dirais presque cette haute présomp- tion, si je pouvais ennoblir le mot, qui est encore un carac- tère non moins général de tous les grands révolutionnaires, car pour mener à fin une révolution, non seulement il faut une certaine partialité, à l'aide de laquelle nous voyions dans le passé le mal un peu à l'exclusion du bien, mais encore il faut avoir foi en sa propre raison et en l'idée nouvelle qu'on vient présenter à la place de l'idée ancienne. Quiconque n'a pas cette foi en lui-même et en ses propres doctrines, appor- tera nécessairement dans la lutte ces hésitations et ces incer- titudes qui retardent le triomphe des meilleures causes. Cette confiance et cette foi n'ont pas manqué à Descartes ; on ne saurait lire les premières pages du discours de la Méthode sans être confondu par la hardiesse et l'énergie de la pensée. Descartes commence par condamner tous les systèmes anté- rieurs, et par déclarer que rien, avant lui, n'a été fait en philosophie, que tout reste à faire ; puis il entreprend de faire à lui tout seul ce que tant de siècles, ce que tant d'hommes de génie n'ont pu faire. Il se dépouille de toutes les opinions reçues, il fait de son intelligence une table rase, il entre- prend d'élever l'édifice tout entier de la philosophie depuis les fondements jusqu'au faîte. De telles prétentions ne sont assurément pas petites, mais lorsqu'elles viennent d'un homme