Pour une meilleure navigation sur le site, activez javascript.
page suivante »
                                     426
   Innocent IV ne pouvait rester long-temps à Gênes sans
avoir à craindre les attaques de l'empereur ; son intention
était de se rendre en France; l'injure que Frédéric avait faite
à Louis IX (1), le zèle outré de celui-ci pour tout ce qui tou-
chait aux intérêts de la religion catholique, l'occasion d'éta-
blir la supériorité de la France sur l'Allemagne , faisaient
avec raison espérer au pontife qu'un asile lui serait accordé
avec empressement. Le roi de France était alors à Citeaux,
où devait se tenir une assemblée ecclésiastique; il était ac-
compagné de la reine Blanche, du comte d'Artois, d'Alphonse,
comte de Poitiers, du duc de Bourgogne et d'un grand nombre
de seigneurs; le pontife lui fit demander un asile par l'entre-
mise de l'abbé de Citeaux, en disant qu'il espérait être reçu
en France comme l'avaient été jadis Alexandre III, persécuté
par Frédéric Barberousse , et saint Thomas de Cantorbéry,
 proscrit par Henri II (2). Rien n'avait été oublié par les amis


   (1) Lorsque Geoffroy, évêque de Sabine, fut élu pape sous le nom de
Célestin IV, il avait pour concurrent, Romain , cardinal de Saint-Ange , an-
cien ministre de la reine Blanche, mère de Louis IX. L'empereur déclara
qu'il s'opposerait à l'élection du cardinal de Saint-Ange , parce qu'il avait
été reçu dans le lit de la reine-mère, et qu'il était trop dissolu pour en faire
un pape. Mathieu Paris dit aussi qu'on prétendait que la reine-mère avait
accordé ses faveurs au comte de Champagne et au cardinal : « Haec domina,
ut dicebatur, tam dicti comitis , quam legati romani semine Polluta , mêlas
transgressa fuerat pudicitias. » Mais le même historien dit très-positivement
que ces bruits étaient répandus par les ennemis de la reine, qu'ils étaient
dénués de fondement, et qu'on ne pouvait y croire sans impiété. Nous ob-
serverons en outre que Frédéric devait être peu sévère sous le rapport des
mœurs, puisqu'il était extrêmement dissolu ; il est doue probable qu'il se
servit de celte accusation, à défaut d'autre, pour ne pas laisser élire un pape
dévoué aux intérêts de la France , et que ce fut là le véritable motif de son
opposition à l'élection du cardinal de Saint-Ange.
   (2) En 1192, l'église de Fourvières fut fondée en l'honneur de la Vierge
et de saint Thomas de Cantorbéry. Gallia Chrisliana instrumenta Ecclesiœ
Luffdunensis, col. 23, t. îv. L'archevêque de Cantorbéry demeura quelque