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295 filles, si ce bel enfant meurt ainsi d'une mort si cruelle. Mais personne n'osait intercéder en sa faveur. Le bon archevêque Turpin fut le seul qui brava le courroux de l'empereur en priant pour Oger. — Sire, dit-il, grâce pour cet enfant, car il est le meilleur et le plus malheureux, comme le plus beau de tous les enfants des hommes. Il est clair qu'il vous fut livré par une bien noire trahison. Sa marâtre est, vous le savez, sorcière et fée. Elle a, sans nul doute, par ses breuvages, troublé la mémoire et la raison du fier Da- nois. Et Gaufroy n'a plus souvenance du gage précieux qu'il a remis entre vos mains. Le messager, chevalier loyai, confirma par serment les soupçons de l'archevêque. Tous les barons se joigni- rent à lui pour demander la grâce de l'enfant Ogcr. L'empereur se décida , non sans peine, à le faire compa- raître devant son trône pour l'interroger; et, réprimant son courroux, il interrogea l'enfant avec douceur sur les faiblesses de son père et les grandes cruautés de sa marâtre. — Le corbeau fut maudit, répondit Oger avec une assurance modeste, pour avoir sali le nid de Son père; depuis ce temps, il erre inquiet et misérable, le ventre en proie aux horreurs de la faim, et ne trouve plus pour se repaître que des chairs corrompues. Puis il se tut et baissa les yeux comme attendant sa sentence. 11 cachait ainsi quelques larmes qui roulaient dans ses yeux , car la mort lui semblait bien amère. Les barons le louèrent avec transport, et dans toute la noble assemblée, on n'en eut pas trouvé un seul qui ne pleurai. Mais Charletnagne ne pleura point. — Que les fiers Danois soient maudits, s'écria-t-il. Mes