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225 sortir de la ligne qu'il s'était tracée; il a fallu, en quelque sorte, faire violence à sa modestie pour le déterminer à accepter le titre d'honneur et de distinction qui lui était offert. Enfin, vaincu par le respect qu'il portait à Mgr. et le prix qu'il attachait à tout ce qui venait de sa Gran- deur , il consentit à prendre possession de sou cano- nicat honoraire; depuis lors, il redoubla de zèle et de courage pour assister aux offices de l'église. 11 venait, mal- gré son grand âge et ses infirmités habituelles, quelque- fois de deux lieues, pour prendre part aux grandes so- lennités de la métropole. Toutefois , M. de Servan ne jouit pas longtemps du titre honorifique qui l'attachait au chapitre métropolitain de Sl- Jean ; son âge avancé l'avertissait tous les jours de sa fin prochaine ; aussi l'envisageait-il de près avec l'œil du phi- losophe chrétien, c'est-à -dire, plein de défiance en lui- même et plein de confiance en un Dieu miséricordieux. Ces deux pensées combinées entretenaient dans son ame une sorte de paix, de sérénité, de douceur qui se reflétait dans tous ses traits, dans toutes ses paroles, dans l'en- semble de sa vie. Chaque jour enlevait à M. de Servan un de ses sens; il n'y a eu que son esprit et son cœur qui sont demeurés, jusqu'à la dernière heure, ce qu'ils avaient toujours é t é , c'est-à -dire, pleins de droiture et de chaleur. Au milieu de cette destruction successive et visible de son ê t r e , no- tre pieux chanoine adorait avec résignation la main de Dieu qui brisait, les uns après les autres, les liens qui l'attachaient à la terre. Il se servait avec avantage de cette défaillance de la nature pour s'élever de plus en plus vers le Seigneur. Une fois pourtant son ame ne put contenir le sentiment de peine et d'amertume qui l'accablait, ce