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166 c'est tout au plus , si à de rares intervalles un rayon éga- ré vient trancher l'obscurité qui règne à toute heure dans ce labyrinthe. La rue des Consuls, celle des Princes, sont un peu plus spacieuses , mais présentent le même aspect; seulement quelques légères sculptures ornent leurs portes toujours aussi difficiles à découvrir. Ce pays inconnu, où notre arrivée n'avait pas produit le moindre changement d'habitude, où les femmes sembla- bles a des ombres, circulaient enveloppées de voiles de la plus rigoureuse épaisseur , ou du haut des minarets le Muézim aveugle appelait régulièrement à la prière, où les boutiques toujours pleines de fumeurs retentissaient des sons de la mandoline, tout cela complétait pour nous le tableau encore brillant de féeriques couleurs , que la lecture des Mille et une nuits, fantastique récréation de notre enfance avait ébauché dans nos esprits ; l'imagination éveillée par la nouveauté de ces impressions , nous crûmes voir plus d'une fois parmi les Turcs auxquels la capitulation permet- tait le séjour d'Aller, le Calife Aroun et son visirGiafar, allant à la quête des aventures. Nous aussi nous parcou- rions la ville en tous sens , guêtant une maison abandon- née , une porte entr'ouverte pour jetter un coup d'œil dans ses mœurs , si étrangères aux nôtres. Mais pendant un mois que dura notre premier séjour à Alger , nous ne pûmes qu'une seule fois entrevoir ces mystères ; jusques là nous dûmes nous contenter de visiter les édifices publics qui nous furent tous ouverts par les soins de notre excellent ami le général Després ; encore fallut-il en excepter les mosquées , qu'un article spécial du traité interdisait for- mellement aux chrétiens. Nous comptâmes sept ou huit écoles publiques , plusieurs bazars , huit grandes casernes et six maisons pour les esclaves situées près des marchés.