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vers le récit sec et rapide d'un article biographique, je
vis se dessiner une figure arrêtée dans ses contours, d'un
caractère neuf et oi'iginal, je sentis le besoin dé. l'étudier
dans son expression la plus délicate, dans ses traits les
plus mobiles. Alors je m'enfermai avec lui, m'ingéniant
à le deviner, cherchant dans ses actes et ses écrits un
indice de ses pensées, un reflet de son génie. J'épiais ses
sentiments, je m'enquerrais de ses peines, et quand un
instant trop rapide de passion franche et ingénue venait
à entr'ouvrir son aine, j'y plongeais le regard, comme
dans les plis du nuage déchiré par l'éclair. Mainte-
nant avec lui plus de gêne ou de réserve; une sorte d'a-
mitié est née de ce commerce familier, de cet entretien
de quelques jours. Aussi je veux le présenter à notre
siècle tel qu'il était dans le sien, tel que je le comprends,
 après lui avoir rendu sa physionomie, son allure, enfin
la vie.
   Ce n'est donc pas d'une biographie qu'il s'agit ici, où
du moins c'est d'une biographie psychologique; c'est h
vie de l'ame que je veux écrire. Assez d'autres s'attachent
aux faits extérieurs; moi, je n'en dirai que ce qui est
indispensable à l'intelligence des phénomènes moraux.
   Tout ce que l'on connaît maintenant de Pic de la "Mi-
randole est sa prétention à la science universelle, sa thèse :
De omni Re Scibïli, enfin les neuf cents propositions pu-
bliées à cette occasion, et qui, comme un autre Babel,
sont demeurées le monument de son orgueil. Mais ce que
l'on ignore, c'est comment il parvint à cette exaltation
de lui-même ; comment il se glorifia dans sa science; com-
ment, revenu de cette ivresse, il se réfugia dans la reli-
gion et mourut en chrétien.
   Jean Pic naquit en 1465. Prince et seigneur de la Mi-